Les Corps glorieux
de Céline Maltère

critiqué par Fanou03, le 19 juillet 2018
(* - 48 ans)


La note:  étoiles
La fragilité des corps
La reine Kationa, redoutable souveraine d’un modeste royaume de Bretagne, n’a plus envie de vivre. Sa bien-aimée Balzane vient de mourir après une longue agonie. Un des chevaliers de la reine revient d’une expédition où il lui affirme avoir revu Balzane. Dès lors Kationa n’aura de cesse, à travers ses voyages ou ses actions, au risque de sombrer dans la folie, d’essayer de retrouver sa compagne disparue.

Comme le suggère la quatrième de couverture du livre, Les corps glorieux  reprend certains codes du roman de chevalerie, du principe de la quête à certaines références à l’amour courtois, de l’omniprésence du symbolisme, voire de l’onirisme ou du mysticisme, en passant par les figures plus ou moins connues (les dragons, les sirènes, la Dame sans Merci, les douze chevaliers qui entourent la Reine, les métamorphoses). L’architecture générale du roman, faite d’histoires indépendantes reliées entre elles par la quête principale, le ton quelque peu archaïsant de la prose, finissent de donner un parfum ancien particulièrement typé. Mais on peut aussi y voir aussi des références au romantisme médiéval anglais (Walter Scott, l’iconographie de John William Waterhouse…).

Le roman relève in fine aussi bien du gothique le plus sombre que de la Fantasy très dark. Une de ses caractéristiques principales la plus intéressante est de se mettre en porte-à-faux avec la quasi-hégémonie masculine sur le genre. Céline Maltère pousse très loin cette déconstruction. Son personnage principal est non seulement une femme mais surtout son rapport aux hommes les exclut de toute respectabilité, mis à part le cas très particulier de Goth, le propre père de Kationa. Veuls, pervers, sanguinaires, dépravés : le portrait des alter ego de Kationa, d’Aquilain IV d’Aquitaine au Long Chevalier Rouge, est accablant ! Cette cohorte haïssable hante le récit, et c’est à se demander si ce n’est pas eux les monstres, tentant d’imposer leur brutalité et leur domination sur les femmes. Pourtant Kationa ne leur cède rien en matière de cruauté. Dans un jeu de miroir troublant, elle-même s’avère être un monstre, d’un sadisme à la limite de l’insoutenable. Elle-même aime les femmes, comme ses vis-à-vis masculins, jusqu’à l’obsession, jusqu'à les priver elles aussi de liberté.

Dans les chapitres structurant le roman, qui sont autant d’étapes vers la catharsis finale de Kationa, s’installent, comme un fil rouge, une réflexion sur l’amour, le désir et la mort, la fragilité des corps, ainsi que leur décrépitude liée à la maladie ou à la vieillesse. Le vertige du pouvoir, ainsi que la perversion qu’il peut engendrer, l’ennui, la folie, y sont aussi largement évoqués. Ainsi un spleen, d’essence presque baudelairienne, vient nourrir l’atmosphère étrange, parfois inquiétant, des corps glorieux . Les récits indépendants constituant le livre, comme autant de fables aux interprétations ésotériques et cachées, sans intrigue principale, donnent parfois un sentiment d’une lecture hachée, immobile. Tout cela vient rajouter au malaise ambiant et à un certain écœurement qui fait des Corps Glorieux  un objet à la très forte personnalité, assez inclassable, aussi fascinant que dérangeant.
Foutoir « dark fantasy » 3 étoiles

Pas glorieux ces corps glorieux. La quatrième de couverture nous présente Céline Maltère comme Agrégée de lettres classiques, on nous vante »son univers, onirique et parfois cruel », … Je vois bien pour l’univers cruel (parfois est de trop), onirique aussi mais à la façon des enfants qui jouent à « on dirait que je serais un gendarme et … » sans souci quelconque de cohérence et de plausibilité dans le récit, mais une chose est sûre, les lettres classiques ne doivent être qu’un lointain souvenir !
On ne peut qualifier ces corps glorieux de roman – et encore moins de S.F. ! – il s’agit plutôt d’une juxtaposition de sketchs, concernant tous la même héroïne ; la reine Kationa, juxtaposition sans que Céline Maltère se donne la peine de monter une histoire cohérente, avec une psychologie adaptée. Non, plus simple est de donner les pleins pouvoirs à Kationa et d’écrire un peu n’importe quoi, sans freins ni tabous, sans bien sûr souci de la moindre plausibilité. Un caprice d’enfant gâté qui ressemble beaucoup aux jeux d’enfants évoqués plus haut, « on dirait que … ». Bon personnellement je ne me sens plus d’âge à pouvoir envisager les postulats tous plus extravagants et délirants collés à la personne de la reine Kationa. Peut-être ai-je passé l’âge en fait ? Oui, peut-être est-ce une affaire d’âge, mais alors ça ne fait pas envie d’avoir l’âge requis pour apprécier ce genre d’histoires à dormir debout, à mi-chemin entre Batman du moyen-âge et mangas de bas étages !
La reine Kationa ; LA protagoniste de ce recueil, toute puissante, sans la moindre moralité, perverse et cruelle … Qu’en dire ? Un personnage de cauchemar à la limite, tout au plus, mais de roman ? Un doute m’habite !
Les hommes, de pathétiques pantins bons à être démembrés ou (et) castrés, normal puisque Kationa n’a d’intérêt que pour les femmes et que Kationa est … la reine (comprendre omnipotente sans limites).
Ses pouvoirs, physiques ou mentaux, pareillement sans limites, battant, tuant, les différents chevaliers qu’elle peut affronter (on retombe dans le syndrome du « on dirait que … » éminemment enfantin).
Je me demande finalement si dans cette catégorie d’écrits n’ayant nul souci de la moindre véracité je ne préfère pas la série des « Oui-Oui » ?! Font moins mal au cœur et ne provoque pas la nausée au moins ! Tiens je vais me laver la tête avec « Oui-Oui et la voiture jaune », youpiiie !

Tistou - - 67 ans - 26 septembre 2019


Une épopée féminine ! 8 étoiles

Agrégée de lettres classiques, Céline Maltère se partage entre son métier et l'écriture. Ses nouvelles et ses romans évoluent dans des univers fantastiques ou merveilleux.
"Les Corps glorieux" est le premier opus du "Cycle de Goth", trilogie romanesque qui raconte l'histoire de trois soeurs souveraines.

A la mort du Seigneur de Goth, ses 3 filles se partagent le royaume.
Kationa fait régner la terreur sur sa terre située sur le duché de Bretagne. Inconsolable après la mort de son aimée Balzane, elle constitue un harem pour tenter de retrouver goût à la vie.
Mais rien n'y fait et elle pense trouver la clé en menant de multiples aventures hors de ses terres.

Plus qu'un roman, ce sont une série d'histoires que nous conte Céline Maltère.
Les codes des romans de Chevalerie, des romans médiévaux nourrissent sa plume.
Ce sont les femmes qui occupent le devant de la scène. Elles égalent les hommes par leur violence, leur cruauté mais savent y mêler sensualité, et volupté.
Les têtes, les mains, les bras sont régulièrement tranchés.
Des aventures baroques, à la rencontre des sirènes, des dragons et autres nains dépravés...
Sortilèges, potions et poisons viennent assaisonner le tout pour pimenter la quête de Dame Kationa.

Certes, les vies sont éphémères dans ce livre, mais je me suis pris au jeu et ai globalement pris du plaisir à sa lecture.
Ces chroniques de la Reine Kationa sont superbement écrites (une qualité d'écriture indéniable) , les références historiques et mythologiques nombreuses.
Je vous conseille de lire et relire le chapitre 8 - La lucarne - d'une puissance évocatrice rare à mon avis.
Un très agréable moment de lecture .

Frunny - PARIS - 58 ans - 22 juillet 2019


Tueries, castrations, massacres et cruautés inutiles, sadisme... 2 étoiles

La reine Kationa, une « héroïne » égoïste, imbue d’elle-même, impitoyable, coupe les têtes, tranche les membres, éviscère les ennemis comme elle collectionne les femmes dans son harem.

C’est peu dire que cette « héroïne » m'est antipathique...
(Lu pour le prix CL2019)

Un émissaire lui porte un message
« Tatouez au fer rouge ma sentence sur le corps de ce tendre jeune homme, qu’il se souvienne de Kationa en portant ma réponse à son maître : NON ! »

« Je ne versais pas le sang des bêtes mais, la dernière nuit de décembre, on enlevait des enfants en bas-âge dans les terres voisines : en l’honneur de quelque Amazone, je plantais un cimeterre dans ces petits corps innocents, transperçant leur cou pâle et fragile de garçons. »

Ludmilla - Chaville - 68 ans - 15 janvier 2019