Le petit blond de la Casbah
de Alexandre Arcady

critiqué par CCRIDER, le 1 juin 2004
(OTHIS - 76 ans)


La note:  étoiles
C'est bon comme là-bas , dis !
Alexandre Arcady , le cinéaste bien connu ("Le coup de sirocco , Le grand Pardon , le grand Carnaval " ) nous livre ses souvenirs de petit juif d'Algérie , de petit blond de la Casbah qui vivait avec ses quatre frères au 7 rue du Lézard , tout à côté du quartier arabe , parmi les petites gens , avant l'Indépendance .
Sa mère , Driffa , est une juive originaire du bled ( Borj Bou Arreridj ) et son père , Alexandre , est un ex-légionnaire hongrois . Ils vivent dans une grande pauvreté car le père ne trouve pas de travail et la mère doit nourrir , en plus de sa famille nombreuse , sa vieille mère impotente , Lisa . Il n'empêche que pour Arcady , c'est le temps de l'Algérie heureuse , du bonheur et de l'insouciance au soleil .
On découvre quelques personnages hauts en couleur : le cousin Coco , proxénète d'opérette avec ses costumes voyants et ses chaussures bicolores , l'oncle Jacob , inventeur de bougies à paillettes fabriquées avec la céramique de bidets ou de cuvettes de WC de récupération et la tante Blanche qui allait deux fois par semaine chez le coiffeur ...
Un triste jour de décembre 60 , Alexandre , sentant venir la fin , suite au saccage de la synagogue d'Alger par des musulmans , rapatrie , 18 mois avant tout le monde , toute sa petite famille en France .
Le livre est , bien sûr , dégoulinant de nostalgie . " Dans la Bible , il est dit qu'Israël , c'est le pays où coulent le lait et le miel et bien tu vois , l'Algérie , d'avant , c'était pareil , en mieux ."
Le tableau oscille entre l'idyllique ( tout le monde s'aimait et s'entr'aidait , le chrétien , le juif et le musulman ) et le réaliste : la haine raciale y a libre cours . L'auteur ainsi que les quelques élèves chrétiens sont en proie aux violences et aux insultes à la communale car ils sont très minoritaires face aux musulmans alors que c'est l'inverse qui se produit au lycée car le rapport de force s'y inverse .
La nostalgie a ses limites . Ainsi , lorsque la mère revient en France , suite à son retour en Algérie après vingt ans d'éloignement , déclare : " C'était bien , mon fils , mais je me demande vraiment comment on a fait pour vivre là-bas ."
Mémoires que l'on peut lire si on s'intéresse à la question des rapatriés d'Algérie , la fameuse histoire de la valise ou du cercueil . Il reste quand même à remarquer que si ce livre avait été écrit par un inconnu , il n'aurait sûrement jamais été publié . Et cela aurait été dommage car il fait bien comprendre le poids infini des occasions manquées et des fautes qu'il faut maintenant payer au centuple .