Sunny Vol.1
de Taiyō Matsumoto

critiqué par Fanou03, le 4 mars 2018
(* - 48 ans)


La note:  étoiles
Les enfants perdus
Le foyer des « enfants des étoiles » ce jour-là accueille Sei, un jeune garçon d’une dizaine d’année, originaire de Yokohama. Il découvre petit à petit son nouvel univers et ses compagnons : Junsuke le (mauvais) joueur d’harmonica, Haruo le caïd aux cheveux blancs, Haruna la jeune fille amoureuse... Et la Sunny, une voiture abandonnée au fond de la cour de l’établissement qui sert de cabane aux enfants, nourrit leurs rêves et leurs envies de liberté.

Il en va des mangas comme bien d’autres genres : à côté du gros de la production, souvent standardisée, on a le bonheur de rencontrer des ouvrages qui s’en démarquent profondément. C’est le cas de Sunny, dont la personnalité graphique saute aux yeux dès les premières pages. Mélange réussi de réalisme (les personnages ont de vrais yeux bridés et arborent leur dent quand ils sourient, Junsuke est dessiné avec sa morve au nez), de certains codes de l’art naïf (distorsion des proportions, roses aux joues de tous les enfants...), voir d’onirisme, ce premier tome nous plonge avec beaucoup de justesse dans le quotidien d’enfants placés dans un foyer d’aide social.

C’est ce quotidien qui rythme l’album, les chamailleries, les retrouvailles provisoires avec les parents, le regard jugeant des habitants du bourg rural où est localisé le foyer, les histoires que s’inventent les enfants dans la Sunny. Cette chronique est à la fois très prosaïque (une réunion pour savoir qui ne tire jamais la chasse d’eau après son passage aux toilettes...), chargée d’émotion et de poésie. Le fantastique n’est pas loin, comme l’énigmatique présence de Taro, une sorte de sumo simplet qui ne fait que chanter des chansons à la mode et couve de sa gentillesse les plus petits du foyer.

Le foyer est-il-devenue une famille de substitution à tous ces enfants ? Y sont-ils heureux ? C’est une des questions que soulève l’ouvrage, car effectivement la présence de « grands frères » et de « grandes sœurs », d’éducateurs sévères mais plutôt bienveillants, du côté assez intimiste de l’institution pourrait donner ce sentiment-là, mais c’est peut-être sans compter le poids de l’absence irrémédiable des parents, comme une plaie ouverte, qui charge l’ambiance d’une tristesse intérieure, d’une irrémédiable mélancolie.