Lettre au père
de Marc Alpozzo

critiqué par Pjb33, le 29 janvier 2018
(Bordeaux - 72 ans)


La note:  étoiles
le fantôme du père
La jeune édition belge Lamiroy vient de lancer en 2017 une collection de tout petits livres (14 x 10 cm, de 30 à 45 pages chacun) intitulée "Opuscule", qui a la particularité de publier une nouvelle complète, dont relativement courte, dans chaque numéro.
La "Lettre au père" est un récit de Marc Alpozzo. Le narrateur a eu un père américain avec qui il a vécu aux USA dans les premières années de sa vie, avant que sa mère ne le ramène en France en 1976. Il ne l'a donc presque pas connu, à l'exception du Noël 1980 où le père américain l'avait invité à New York. Retrouvant par hasard dans un carton une vieille photo couleur des années 70, et voulant solder le passé, le narrateur décide d'écrire au père.
"Je ne me souviens pas de t'avoir senti m'embrasser. Je ne me souviens pas de t'avoir vu me prendre dans tes bras". "J'ai donc grandi sans père". Ce père qui, fils d'immigré italien, était le parfait exemple du "modèle américain du self-made man". Mais le problème, c'est qu'un "garçon sans père n'a pas de modèle". Résultat, le narrateur finit par déprimer, se sentant adolescent "l'indésirable. L'enfant oublié", flirtant avec la mort et le suicide, puis se décidant à suivre une psychothérapie. En 2012, il tente de retrouver la trace de ce père. Mais il est trop tard. Le père était mort. Par un retour sur lui-même, le narrateur comprend qu'il doit pardonner, que "tout jugement était désormais hors de propos".
Un texte bref et fort pour tenter de comprendre comment un père peut abandonner un fils et comment la filiation au père reste importante.
L'auteur, philosophe, a publié déjà plusieurs livres, dont une étude sur JMG Le Clézio dans la collection numérique "Duetto", il est aussi critique littéraire et animateur radio.