Un vautour au pied du lit
de David McNeil

critiqué par Darius, le 28 décembre 2017
(Bruxelles - - ans)


La note:  étoiles
chronique cancéreuse
David McNeil est le fils biologique de Marc Chagall. Il est musicien, chanteur, parolier, photographe et écrivain.

Dans ce dernier roman, il nous conte avec humour son cancer de l’œsophage. Le titre du livre « le vautour au pied du lit » nous décrit l’oiseau de proie qui le guette depuis son lit d’hôpital, cette chambre qu’il nous décrit dès la première page:

« C’est à Potsdamer Strasse, dans l’ancien Berlin-Est qu’ils ont dû trouver le mobilier militaire qui garnit la chambre.. Le lit dans lequel je me réveille est bien trop haut, bien trop droit, trop étroit, avec des pieds en tubes de métal peints en gris, entre gris souris et ciel de novembre, plus clair que celui des navires de guerre, mais plus foncé que ceux du temps où ces bateaux se faisaient la guerre. »

« J’ai rallumé la télé. Sur la chaine intérieure de la clinique, ils proposaient un épisode de Derrick, cette série bavaroise tournée sur pellicule bon marché venue d’Allemagne de l’Est… Depuis on a découvert que Horst Tappert, l’acteur principal avait fait partie de la Waffen SS, alors le monde entier a boycotté le feuilleton, au grand regret des retraités, des malades et des grabataires, c’était la seule série qu’ils parvenaient à comprendre.. »

"‘Il y a un vautour au pied de mon lit. Il me fixe de ses yeux immobiles, venant lui aussi d’apprendre que je n’en ai plus pour longtemps, dans les hôpitaux les nouvelles vont vite. Il est là, serres agrippées aux barreaux du lit, il attend. Ces charognards ne clignent jamais des yeux, ils n’ont pas de paupières et c’est très troublant. Alors je me recroqueville sous mon drap, évitant son regard, puis je me redresse, essayant de maîtriser ma peur, je fixe l’épouvantail d’un air déterminé.. Mais l’animal ne détourne pas une prunelle. Il me fixe toujours et je finis par crier « fous le camp, sale bête ! Mais évidemment il ne bouge pas d’une plume, il reste impassible. Le salaud a tout son temps. C’est la force de ces chacals volants, ils ont tout leur temps, contrairement à nous. Depuis trois jours, le rapace me toise, salivant déjà, à la façon de quelqu’un qui regarde à travers la vitre de son four à chaleur tournante un poulet rôti sur la broche… J’espérais que l’arrivée de l’infirmière allait faire peur à l’animal, mais il reste là, les serres bien agrippées aux barreaux de mon lit. Etrangement, l’infirmière semble ne pas le voir ou bien elle est habituée à la présence de ces cafards ailés au chevet des malades incurables. »

On ne s’ennuie pas une seconde alors qu’il s’agit tout de même d’un cancer grave, mais l’auteur a tellement d’humour, tellement de culture, qu’on est triste de refermer le livre sur sa guérison.