Les Paysans de Honoré de Balzac

Les Paysans de Honoré de Balzac

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Cyclo, le 8 novembre 2017 (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 864ème position).
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un roman très noir

Décidément, pour les auteurs réalistes du XIXe siècle, de Balzac à Maupassant et Zola, le paysans sont dépeints d’une manière le plus souvent négative. Mais le summum, c’est ce roman de Balzac, "Les paysans", considéré cependant comme un des plus importants de la "Comédie humaine". Il y a longuement travaillé (dans sa dédicace, l'auteur affirme avoir « pendant huit ans, cent fois quitté, cent fois repris ce livre, le plus considérable de ceux que j'ai résolu d'écrire ») et dresse ici un sombre portrait de la campagne sous la Restauration, où la lutte des classes (petite paysannerie alliée à la bourgeoisie issue de la paysannerie contre l’aristocratie) se fait féroce.

Un ancien général d’Empire, d’origine roturière (les paysans le surnomment le "Tapissier"), le comte de Moncornet (noblesse d’Empire), a acheté en Bourgogne le château des Aigues et les terres environnantes, peu éloigné de la petite sous-préfecture de La Ville-aux-Fayes. Pour conforter sa récente noblesse, le général a épousé une descendante de l’ancienne aristocratie et rêve de devenir pair de France. Il souhaite faire de son domaine une terre bien gérée et il y règne autoritairement en engageant comme gardes forestiers d’anciens soldats de Napoléon pour l’aider à lutter contre les pratiques paysannes traditionnelles, notamment le vol du bois dans ses forêts, que l’ancienne propriétaire, une cantatrice célèbre, avait autorisé pour avoir la paix sociale.
Mais il se heurte à la ligue de tous ceux qui y perdent, non seulement les paysans pauvres, mais aussi les notables locaux, qui rêvent de le chasser pour s’emparer de ses terres. L’épreuve de force sera fatale au garde Michaud, assassiné sans qu’on puisse trouver ses meurtriers. Montcornet, brisé par ce meurtre, se sent menacé de mort et se résout à vendre son domaine. Ce dernier est vendu en petites parcelles, et le château détruit.

L’idée centrale est que la Révolution a libéré des forces incontrôlables et maléfiques pour la société, et au passage, il égratigne à plusieurs reprises Jean-Jacques Rousseau considéré comme le responsable : à la fin du livre, Émile Blondet, découvrant la déchéance du domaine des Aigues et de son parc devenu un refuge de miséreux, s'exclame : « Voilà le progrès ! C'est une page du "Contrat social" de Jean-Jacques ! ». Les paysans sont ici décrits non seulement comme frustes, ignorants, mais aussi brutaux, alcooliques, amoraux, et particulièrement haineux et rancuniers. C’est le Balzac conservateur qui domine ici (le livre scandalisa Michelet), et qui contraste avec la vision idéalisée du monde rural de George Sand.
Pour autant, il semble bien que Balzac ait été très bien renseigné sur les révoltes paysannes bourguignonnes sous la Monarchie de juillet, et qui culmina avec de nombreux assassinats de gardes forestiers. Le contraste est vertigineux entre la société aristocratique composée par la comtesse de Montcornet, son ami l’écrivain Blondet (qu’elle épousera en secondes noces), et l’abbé Brossette, qui voit son église complètement désertée, et la vie de château qu'ils mènent, et le tableau des cabarets, rendez-vous des paysans, tandis que, dans l’ombre, les notables locaux, souvent issus de la paysannerie, enrichis sous la Révolution, occupent les places qui leur permettent de jouer un rôle occulte : l’usurier Rigou et les maires des communes voisines Soudry et Gaubertin. Par le jeu des alliances matrimoniales, ces derniers sont liés au personnel de l'administration, de la justice, de la police et du commerce local. Contre de tels adversaires, dissimulés sous le masque de la respectabilité, Montcornet tentera vainement de lutter.
Roman vraisemblablement inachevé, bien que donnant l'illusion d'un roman complet, "Les paysans", qui aurait sans doute été le roman le plus long de Balzac, reste un monument. Et ceci, malgré le manque d’objectivité et les préjugés flagrants de l’auteur. Les différents milieux sociaux y sont décrits avec sa maestria habituelle, avec le souci du détail significatif et un sens de l’observation impitoyable. Donc, bien que peu séduisant en apparence (surtout pour ceux qui, comme moi, ont passé leur enfance à la campagne), ce roman suscite l'admiration et l'intérêt.

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Le droit du sol !

7 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 18 avril 2021

L'histoire est la réalisation d'un projet très ancien de Balzac. Il n'aura jamais l'occasion de le terminer.
La ville imaginaire où se déroule l'action du livre est "La Ville-aux-Fayes". Il est probable que ce nom soit un hommage au marquis de Villers-La Faye, ami de l'auteur, qui eut des démêlés avec son château et ses propriétés et les affermés et habitants des alentours. Balzac n'étant pas vraiment un homme de la campagne, les mauvaises langues diraient qu'il n'avait jamais vu une prairie, cette version du marquis serait plausible.

L'action débute en 1823, les propriétés de la noblesse et de l'église ont été confisquée par les révolutions successives. le comte de Montcornet rachète la propriété des Aigues mais ne se fait pas que des amis. Les nombreux démêlés avec les paysans s'enveniment. Les simples maraudages de jadis se muent en vols francs, sabotages et même meurtre.
En campagne, bourgeoisie et paysannerie se côtoient avec des échanges de petits services, tout le monde se connaît et s'allie au gré des intérêts. Le Comte qui représente la noblesse honnie par la révolution va devenir l'ennemi.
Qui gagnera cette lutte ?

Qu'en penser.
Encore un texte très difficile à ingérer. Les longues descriptions et la multitude de personnages rend la lecture saccadée. Il n'en demeure pas moins un passage clé de l’œuvre de la Comédie humaine.


PERSONNAGES

Emile Blondet : Né en 1800, Emile journaliste et préfet est le fruit d’une liaison de sa mère avec le préfet d’Alençon. Il épouse la veuve du général Montcornet, Virginie de Troisville.

Sophie Laguerre : (1740-1815) Actrice entretenue et propriétaire des Aigues avant le général Montcornet.

Sibilet père: Greffier au tribunal de la Ville-aux-Fayes. Epouse Mlle Gaubertin-Vallat. De cette union naît Adolphe en 1791, employé au Cadastre, puis intendant.

Adolphe Sibilet : Epoux d’Adeline Sarcus avec qui il a deux enfants.

Rigou : Ancien bénédictin, Grégoire Rigoud est le maire de la commune de Blangy.

François Gaubertin : Né en 1770, intendant aux Aigues puis maire de la Ville-aux-Fayes. Il épouse Isaure Mouchon.

Claude Gaubertin : Fils de François et Isaure Gaubertin. Claude est avoué à la Ville-aux-Fayes.

La Godain : Paysanne de Blangy qui a un fils qui épouse Catherine Fourchon.

Courtecuisse : Garde général aux Aigues.

Fourchon : Naissance : 1753 – Homme à tout faire de Blangy. Père de deux filles, Philippine qui épouse François Tonsard, cabaretier avec qui elle a quatre enfants : Jean-Louis, Nicolas, Catherine, Marie. Sa seconde fille a un fils naturel, le petit Mouche.

Justin Michaud : Cet ancien militaire devient garde général aux Aigues. Il est assassiné en 1823.

Montcornet : (1774-1838), le comte de Montcornet est fait général puis maréchal de France. Il épouse Virginie de Troisville (1797) qui deviendra après le décès du comte, l’épouse d’Emile Blondet.

Catherine Tonsard : Fille de François Tonsard et Philippine Fourchon, épouse de Godain.

Mère Tonsard : Paysanne à Blangy, mère de François cabaretier.

La Bonnébault : Vieille paysanne à Blangy. Elle a un petit-fils Jacques qui a servi comme soldat dans l’armée.

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