Le club des métiers bizarres
de Gilbert Keith Chesterton

critiqué par Sahkti, le 11 mai 2004
(Genève - 50 ans)


La note:  étoiles
Folie britannique
Le récit de Gilbert K. Chesterton est, comme son auteur, étonnant ! Des histoires excentriques, proches de la douce folie, fantaisistes à souhait et débridées comme je les aime. Chesterton est savoureux et ses remarques acides pleines de bon sens ("Les miracles devraient toujours se passer en plein jour. La nuit les rend croyables, donc vulgaires" ou "La vérité doit forcément être plus étrange que la fiction car la fiction n'est qu'une création de l'esprit humain et, par conséquent, est à sa mesure").

Le Club des métiers bizarres (The Club of Queer Trades) est un club très fermé regroupant des personnes ayant inventé leur métier et étant donc, par la force des choses, les seules à l’exercer. Cela se passe à Londres (aurait-on pu concevoir une autre ville pour une telle histoire ?), avec des individus au flegme "so british". Parmi les différentes histoires qui composent ce volume, un coup de cœur pour celle du Major Brown, militaire à la retraite passionné d’horticulture et amoureux des pensées jaunes. Un jour de balade, il regarde par hasard vers un jardin soigneusement caché derrière un mur et y découvre un immense parterre de pensées jaunes formant la phrase "Mort au Major Brown". Surprenant et angoissant !
Tout le récit est sur ce ton décalé et curieux, une succession d’énigmes et de devinettes auxquelles on participe sans relâche, en tant que lecteur-spectateur envoûté par ces intrigues.

C’est que c’est bien plus qu’un roman policier ! Si il existe bel et bien une intrigue, un coupable à la fin et la résolution d’une enquête rondement menée, l’accent est avant tout placé sur les protagonistes du livre et la société anglaise en général. Une société figée, rigide, dans laquelle il est pourtant possible de mettre un brin de fantaisie et de folie, en témoigne ce club des métiers bizarres qui regroupe des notables soucieux de mettre du piment dans leur vie grâce à leur profession. On a beau paraître le plus rangé ou soucieux de l’ordre moral qui soit, il n’en demeure pas moins, d’après Chesterton, qu’en chacun de nous existe une part d’excentricité qui ne demande qu’à s’épanouir.
Et c'est franchement hilarant !