Oeuvres complètes, tome 1
de Ivan Illich

critiqué par Sahkti, le 30 avril 2004
(Genève - 49 ans)


La note:  étoiles
A bas l'école?
Fayard l’avait annoncé, les voici, ces fameuses Œuvres complètes de Ivan Illich, penseur contestataire par excellence, ennemi farouche des organisations aliénantes dont fait partie l’école, cette machine à détruire la personnalité. En relisant les textes présentés dans cette compilation (le premier volume reprend : Libérer l’avenir, Une société sans école, Energie et équité, La Convivialité et Némésis médicale), on se rend compte que la révolte est toujours là, elle n’a pas pris une ride. Illich a raison sur plus d’un point, nous devons veiller à ce que ces beaux objets que nous fabriquons ne nous empêchent pas un jour d’être maîtres de notre propre destinée, nous ne devons pas leur aliéner notre autonomie au profit de leurs performances. A force de vouloir bien faire, on en fait trop et c’est la catastrophe. L’école fait partie de ces moyens pervertis. Selon Illich, on n'y apprend peu de choses, aucune profession et on entraîne de moins en moins, voire plus du tout, notre esprit à l’éducation.

Evidemment, de tels propos ne peuvent laisser indifférent et je trouve salutaire cette édition par Fayard à l’heure où tout le monde s’insurge contre "la guerre à l’intelligence" ou le nivellement par le bas dont souffre l’éducation.
Mais Illich ne se résume pas qu’à l’école, il attaque la mondialisation, la société de consommation, la destruction de nos ressources naturelles. Se basant sur son expérience sud-américaine, Illich explique que si nous étendons notre mode de vie à toute la planète, nous courons au chaos et, à moyen terme, à notre perte. Cette critique ne se limite pas à une dénonciation du système de consommation ou des autorités décideuses, cela s’applique aussi à des institutions bien établies comme l’école. L’école, cet organe qui, en vertu de son monopole du savoir et la diffusion qu’elle possède, assène à nos chères têtes blondes ce qu’elle pense être utiles pour elles. Le diplôme obtenu est le sésame pour réussir dans la vie, sans cela on est fichu. C’est de l’exclusion organisée.

Si les théories d’Illich sont plaisantes et toujours actuelles, les critiques formulées à leur égard le sont également. En effet, rendre à la femme un rôle plus fort (qui passe par une baisse ou une suppression de son temps de travail à l’extérieur) dans l’éducation des mômes est intéressant mais peu applicable par les temps qui courent. Bosser à deux est de plus en plus souvent indispensable et pendant qu’on bosse, on ne peut élever avec la même intensité qu’en étant tout le temps présent, l’école supplée cette carence. Il convient donc de réformer intelligemment celle-ci et pas de la supprimer.