On ne paie pas ! On ne paie pas !
de Dario Fo

critiqué par Septularisen, le 8 avril 2017
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
UNE ŒUVRE DES PLUS EFFICACES!
Au début de la pièce nous sommes dans un modeste appartement de la banlieue de Milan. Deux femmes Antonia et Margherita rentrent juste du supermarché, mais cette fois elles n’ont pas fait leurs courses en payant. En effet, avec une centaine d’autres femmes, elles ont littéralement pillé le supermarché et sont parties sans payer.

Plus que du vol, c’était avant tout un acte de révolte, pour protester contre la vie chère et le prix des denrées alimentaires de base qui ne cessent d’augmenter. Antonia a toutefois peur de la réaction de son mari, Giovanni, car celui-ci est profondément respectueux des lois et règlements et ne va certainement pas apprécier les actes de celles-ci.

Les deux femmes décident donc de cacher les nombreux sacs de marchandises volées, sous le lit d’Antonia. Margherita quant à elle va emporter une partie de la marchandise chez elle, cachée sous son manteau en faisant semblant d’être enceinte. Mais Giovanni, qui travaille justement avec Luigi, le mari de Margherita, rentre chez lui juste à ce moment-là, et n’en revient pas de voir la femme de son meilleur ami, d’un seul coup enceinte de cinq mois !

La situation provoque une véritable cascade de quiproquos et de malentendus, d’autant plus que la police à la recherche des femmes qui ont volé le supermarché commence à fouiller tous le quartier pour retrouver les coupables…

« On ne paie pas, on ne paie pas! » est une pièce en deux actes le deuxième comportant quatre tableaux. C’est une nouvelle traduction de Toni CECCHINATO (ancien collaborateur de Dario FO) et Nicole COLCHAT.
C’est surtout une nouvelle adaptation, une version« remise à jour » de la pièce « Faut pas payer » de 1974, réalisée par l’auteur lui-même. En effet, en 2007, après avoir assisté à une représentation de la pièce l’auteur et sa compagne Francesca RAME, avait été étonné par la modernité et l’actualité, toujours présente, de la pièce (la preuve, s’il en fallait une, qu’en 30 ans les choses n’ont pas beaucoup changé…), et avaient décidé d’en réaliser une « remise à jour » avec notamment les noms des hommes politiques italiens de notre époque.

Comme souvent l’auteur italien, sous couvert d’une farce plus ou moins banale, nous propose une critique lucide mais acerbe et corrosive de la société actuelle. Ici plus spécialement l’Italie post Euro, avec notamment les excès des prix des matières premières.
Il nous décrit une Italie en pleine crise économique, et sociale avec le « petit peuple » des ouvriers des usines, abandonnés de tous, complétement à la merci de leurs patrons, des banques, des logeurs, des hommes politiques…
Qui les dépouillent du mieux qu’ils le peuvent !...

C’est cette condition ouvrière que l’auteur excelle à nous montrer avec tout ce qu’elle comporte d’héroïque et de tragique, pour ne pas dire de tragédie !... D’une écriture simple et facile cette pièce est idéale pour découvrir le génie du grand auteur de théâtre italien. A lire donc…

Rappelons que Dario FO (1926-2016) a été le lauréat du Prix Nobel de Littérature 1997, il est au moment où j'écris ces lignes le dernier auteur italien a avoir été récompensé par l'Académie Suédoise.

Découvrez un extrait de la pièce au Festival d’Avignon en 2011, dans une mise en scène d’Iris MUNOS ici :

https://www.youtube.com/watch?v=15WWRomwBY0