La Splendeur des monstres
de Esther Rochon

critiqué par Henri Cachia, le 15 avril 2017
(LILLE - 62 ans)


La note:  étoiles
La belle famille de monstres d'Esther Rochon
On peut affirmer sans conteste que les canadiens sont bien les spécialistes de la nouvelle francophone.
Esther Rochon en tête. Cette jeune femme de 69 ans a reçu en 2015 le prix « Hommage visionnaire » pour l'ensemble de son œuvre, soulignant son apport exemplaire aux littératures de l'imaginaire en Amérique francophone.

Je ne suis pas un fan des nouvelles fantastiques, mais là on atteint des sommets avec ce recueil de 7 nouvelles de ce genre, dont une peut être considérée comme un roman.

En effet, « Coquillage » avec ses 135 pages est bel et bien construit comme un roman. Comme je les aime. Avec sans cesse des allers-retours dans le temps, à la fois une écriture non linéaire qui nous maintient sans arrêt dans la tension et le désir d'en savoir davantage. Les personnages nous racontent leurs pensées contradictoires comme s'ils voulaient s'adresser à notre inconscient, nous mettant sans cesse devant leurs (nos) contradictions.
Disons qu'il s'agit d'un roman érotique où les ébats des humains avec un monstre et la déchéance qui en découle, se déroulent dans un somptueux décor : un immense coquillage. Il est question avant tout d'amour avec tous ses avantages sans les inconvénients inhérents à toute relation amoureuse humaine. En cela, tous les personnages sont subjugués par ce nautile sachant s'adapter aux différents désirs de chacun. Personne ne résiste au charme de ce diable de monstre. D'ailleurs lui-même...

(Ça c'est pour l'anecdote.) Le style d'Esther Rochon fait tout le reste. Et c'est du très haut niveau !

Extrait :

« ...Monstre-nautile, je vis dans les profondeurs sombres, dans les trous noirs, les coins oubliés du réel. J'empoisonne qui me craint, je rends heureux qui me fait confiance ; je surgis si l'on m'appelle très fort... »... « … Je surgis comme un claquement d'espace, je console comme le clair de lune ; l'amour que l'on me donne, je le rends au centuple. Je suis venu parce que tu veux de moi... »