Le cauchemar pavillonnaire
de Jean-Luc Debry

critiqué par Vince92, le 13 juin 2017
(Zürich - 46 ans)


La note:  étoiles
Une critique sociale
Le livre de Jean-Luc Debry (dont on ne sait pas quelle est la qualité : sociologue ? urbaniste ?) est un pamphlet des classes dites « moyennes » en France. Je pensais que ce texte serait une analyse du phénomène pavillonnaire, avec ses lotissements qui s’étalent à la périphérie des grandes et moyennes villes, ses centres commerciaux tentaculaires, ses voies d’accès (autoroutes, voies rapides) qui transforment le paysages du pays en un vaste tarmac, suivant en cela l’exemple du modèle de la ville globalisée, la ville américaine avec son modèle qui a vocation à s’étendre à toutes les parties de la planète.
Las ! La critique urbanistique n’est qu’une accroche pour l’auteur afin de délivrer sa diatribe contre la classe moyenne française qui domine depuis 50 ans déjà le destin et la vie de ce pays : Alors que l’élite économique et politique du temps de la Révolution Industrielle a dû affronter des révoltes récurrentes de la part des classes laborieuses, une inflexion de la stratégie de domination a conduit des intellectuels comme Le Play, Picot ou Cheysson à militer pour l’accès du plus grand nombre à la propriété individuelle et au logement particulier (avec jardin si possible). Ces préceptes ont fait florès et se sont imposés au cours des années post-1945 dans le sillage de la suprématie culturelle nord-américaine.
C’est donc une critique de la classe moyenne, les « masses » d’Ortega y Gasset qui sont les victimes de la plume de Jean-Luc Debry. Souvent acerbe et adroite, celle-ci pèche parfois par un style trop ampoulé et l’auteur perd de sa force de conviction à force de s’écouter parler. Il n’empêche que Debry développe une beau portrait de cette France périphérique (Michéa) qui aspire « à en être » et qu’on autorise in fine qu’à consommer (le dispositif est tellement diabolique qu’il détermine l’individu à consommer, et achève ainsi le but ultime du système capitaliste-libertaire tout en faisant croire à ce même individu qu’il fait partie des happy few qui peuvent consommer, d’où un achèvement d’une certaine forme de reconnaissance sociale via la consommation). Ce thème a été développé à l’envi par une multitude de sociologues et autres intellectuels contemporains, pas la peine de développer.
Le pavillon est l’illustration presque parfaite d’un conformisme développé consciemment par une élite afin de faire disparaître ce que les marxiste depuis Marx lui-même ont nommé « conscience de classe » ce, afin de continuer à exploiter les individus rendus à leur faiblesse depuis qu’ils se sont dissout dans la fameuse « classe moyenne ». Le pavillon, comme d’autres signes extérieurs est le résultat du conformisme ambiant accéléré par l’intermédiaire des moyens de communication comme Internet, les journaux, la télévision,...
Un bon diagnostic pour un livre plus qu’intéressant même si j’en avais commencé la lecture pour de toutes autres raisons.