Les Saisons de l'indépendance
de Martin Lessard

critiqué par Vincennes, le 14 février 2017
( - 31 ans)


La note:  étoiles
Les saisons de l’indépendance
Ana Conception a 17 ans. Elle habite l’île d’Hispaniola sur l’archipel de Caribe avec sa famille : son grand-père, son arrière-grand-père, son jeune frère et son père, le maire du village de Fort Isabella. Les relations avec ce dernier sont difficiles et submergées de lourds silences, d’un passé trouble qu’il s’efforce de garder secret. La mère de la jeune femme s’est enlevé la vie alors qu’elle était toute jeune et ce traumatisme plane depuis à tout moment sur cette famille de cueilleurs. Des gens ordinaires qui devront néanmoins faire face à l’extraordinaire quand les soldats des avant-postes de la Fédération, des hommes-miroirs rompus au combat, débarquent sur son île en quête des puiseurs, des sources d’énergie quasi inépuisables qu’ils convoitent pour alimenter un projet de lien spatio-temporel avec la Terre.

Dépeint comme une jeune femme brillante, l’auteur ne tombe toutefois pas dans le piège de placer Ana à l’avant-plan de la résistance ni sur toutes les scènes de combats. Au contraire, elle n’est qu’un maillon d’une milice mal armé qui réagit tant bien que mal à cet assaut. Et c’est là la force, le réaliste et l’intérêt de cette aventure qui nous happe dès les premières lignes et nous maintient tendus jusqu’à la fin. Une quête d’indépendance qui se joue sur deux fronts, celle d’une adolescente vis-à-vis de son père et celle d’un peuple face à sa subsistance.

Le parallèle avec le Canada francophone est habillement présenté (l’auteur est québécois) par ce petit Archipel entouré d’une gigantesque Mer. Le climat instable aux différences de température subites ajoute aussi aux similitudes. En mode de survit, les insulaires, des déportés de différents horizons pour la plupart, aux coutumes diverses, assujettis à deux empires qui ne les considèrent nullement, sinon que comme une marchandise déplaçable au besoin, devront trouver un point d’entente pour venir à bout des militaires. Et c’est par l’amour de leur pays qu’ils y parviendront.

L’écriture est riche et dépaysante, les dialogues enlevants et rythmés, la narration soutenue d’un parfait mélange de désir, de doute et de fébrilité qui colle à merveille à l’âge du personnage principal.

« Cette façon de chanter, si ardente et festive, mais à la fois empreinte d’une épouvantable nostalgie, me renversa. »

Un excellent planet opera où les relations humaines prennent le dessus sur les scènes de combat et les descriptifs privilégient la beauté à la noirceur. Seul bémol : 250 pages. J’en aurais pris davantage, mais comme le roman se termine sur une fin ouverte, espérons une suite.