Karitas, Tome 1 : L'esquisse d'un rêve
de Kristín Marja Baldursdóttir

critiqué par Marvic, le 21 mai 2017
(Normandie - 65 ans)


La note:  étoiles
Femmes de pêcheurs d'Islande
La vie est dure en Islande en 1915. Dure pour les pêcheurs qui partent pendant des mois, mais aussi pour leurs épouses qui restent seules pour nourrir et élever leurs enfants, avec cette angoisse permanente quand arrive le retour des bateaux.
Femme de l'Ouest, Steinunn se retrouve veuve avec ses six enfants. Elle refuse que ses enfants vivent ces mêmes destins. Au grand étonnement de tous, elle décide que ses enfants iront à l'école, poursuivront des études qui leur permettront d'échapper à ces vies toutes tracées.
Elle va quitter sa région de l'Ouest, et les emmener tous vers le Nord.
Malgré la difficulté des voyages en bateau, ils arriveront à rejoindre le port d'Akureyri prêts à tous les sacrifices pour envoyer les garçons à l'école. Olafur et Pall travaillant aux entrepôts de glace, la mère et les deux aînées, Halldora et Bjarghildur au nettoyage et au salage des harengs. À son grand désappointement, Karitas devra rester "à la maison" pour s'occuper du petit dernier Pétur.

Une vie rythmée par les saisons, travaux de couture, de tricot l'hiver, de salaisons jusqu'aux mains écorchées vives par le sel à la fin de la saison de pêche.
Leurs efforts sont payants, car les deux garçons partiront faire des études, bientôt suivis par leur deux sœurs, l'une dans une école de sage-femme, l'autre dans une école d'Enseignements-Ménagers.
Karitas s'impatiente ; heureusement, sa liberté et sa vivacité lui ont permis de tisser des relations dans le port, qui lui permettront, non seulement de nourrir et chauffer toute sa famille même en période de disette, mais qui lui feront rencontrer Madame Eugenia, une riche dame artiste, persuadée que Karitas possède véritablement un don pour le dessin et la peinture.
Karitas partira donc pour Copenhague.
Cinq années loin des siens, elle revient, diplômée des Beaux-Arts,persuadée que son chemin est tracé.
C'était sans compter sur sa rencontre et son coup de foudre avec Sigmar... un marin.
Karitas devra faire un choix entre sa carrière et son amour ; choix qui ne se posera pas très longtemps.
"Le mot femme de marin lui resta sur le cœur. Elle qui était une artiste. C'était comme si les gens essayaient par tous les moyens de l'oublier".

Un destin formidable que celui de Karitas et de sa maman . Moins d'un siècle sépare Agnes et Margret dans le livre d'Hanna Kent, "A la grâce des hommes" et celui de K.M Baldursdottir, mais on retrouve la même force, la même volonté chez ces femmes islandaises. L'entraide, l'humanité indispensables quand la vie est si difficile dans ces conditions extrêmes.

Au début du livre, une carte de l'Islande permet de suivre les déplacements de Karitas.
Et surtout, des pages intercalées, descriptions de tableaux de Karitas, comme elle les construit, comme elle les voit, permet de suivre l'évolution artistique de la jeune femme,
dessins au crayon, huiles sur toile dans les meilleurs moments, puis collages.

Une belle saga touchante et romantique, autour de ces femmes qui essaient de changer leurs destins, de concilier leur rêves et la réalité ; du souffle tout au long des ces 527 pages.
Coup de coeur partagé de la bibliothécaire qui m'a déjà réservé la suite de la vie de Karitas.