Mes impudeurs
de Marco Missiroli

critiqué par Pucksimberg, le 28 décembre 2016
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
L'apprentissage intellectuel et sexuel d'un jeune italien
Marco Missorli est un jeune auteur italien à suivre. "Mes impudeurs" a très bien marché en Italie et a permis de confirmer le talent de cet écrivain.

Ce roman est un roman d'apprentissage qui se focalise principalement sur deux formations : sexuelle et intellectuelle. Libero ( "libre" en italien ) perd son père violemment, ce père qu'il admirait tant et qui lui a donné le goût de la lecture. Il se souviendra longtemps du jour où il a croisé Sartre aux Deux-Magots et le jour aussi où ils ont appris la mort de l'écrivain existentialiste. L'on suit l'apprentissage de Libero dans tout le roman, les titres de roman ponctuent notre lecture et des liens se tissent entre ses lectures et ce qu'il vit. Parmi les œuvres régulièrement évoquées figurent "L'Etranger" de Camus, "Le Désert des Tartares" et "Un amour" de Buzzati, "Tandis que j'agonise" de Faulkner ... Parallèlement à cette éducation intellectuelle, nous suivons son éveil de la sexualité à douze ans, ses premiers émois et sa sexualité sans ambages.
L'on suit aussi ce personnage attachant à travers Paris dans un premier temps, puis à Milan dans une seconde partie, deux villes emblématiques et au charme certain. On découvre aussi ses premiers métiers et ses premières rencontres amoureuses, amicales aussi avec des figures très sympathiques et profondément humaines comme Giorgio. Il y a aussi deux figures tutélaires qui traversent ce roman et qui sont les piliers de son être : ses parents, un père parti trop vite et une mère solaire, cette mère qui a trompé son père et qui a donc provoqué leur séparation.

Les lectures de Libero alimente son existence. Le lecteur a le sentiment que le narrateur se nourrit des romans qu'il lit, mais que la fiction romanesque alimente aussi sa réalité. Il évoque souvent "L'étranger" de Camus, ce Meursault ancré dans la révolte qui a des difficultés à se libérer. Le nom du personnage renvoie à cette liberté. Dans le roman français, il est question de Marie Cardona, dans le roman italien le narrateur accorde une grande importance à une certaine Marie. Le roman a été transposé au cinéma et c'est Mastroianni qui a tenu le rôle principal, comédien très souvent évoqué dans le roman. Anna Karina jouait le rôle de Marie au cinéma et il y a une Anna très importante dans ce roman. Sans compter un épisode très marquant à la fin du roman qui est en position initiale dans le roman de Camus. Ces mêmes liens peuvent être faits avec les autres romans lus par le narrateur, ce qui prouve bien que lire modifie notre perception du réel et l'on projette sur l'écran qu'est notre vie nos souvenirs de lecture, qui loin de nous éloigner du réel ne font que mieux l'exprimer.
L'apprentissage intellectuel passe aussi par la découverte de films qui construiront son identité.

L'histoire est passionnante, les séquences sont courtes, les personnages très attachants. Le roman n'est pas pornographique ! Que l'on ne s'y trompe pas ! Il est tout de même explicite dans certaines scènes sexuelles. Cette absence de pudeur est plutôt une mise à nu qui permet de comprendre la psyché du personnage principal.Plutôt que de décrire longuement les actes, il les nomme.

Ce roman est touchant et réussi. Certaines scènes sont très émouvantes ( fin du roman ). Marco Missiroli a un vrai talent d'écrivain et une sensibilité qui lui permet d'être au plus juste dans sa narration.