Lum'en de Laurent Genefort

Lum'en de Laurent Genefort

Catégorie(s) : Littérature => Fantasy, Horreur, SF et Fantastique

Critiqué par Cédelor, le 2 décembre 2016 (Paris, Inscrit le 5 février 2010, 52 ans)
La note : 8 étoiles
Visites : 2 593 

Parler du présent en l'écrivant sur du futur, un lum'en écologique

Lum’en est un planet-opera, terme par lequel on désigne un genre de la science-fiction qui décrit des aventures et des histoires se passant sur une unique planète, à la différence du space-opera qui raconte des aventures se déroulant dans l’espace et sur plusieurs mondes. C’est aussi un recueil de nouvelles, 6 en tout, qui se font suite chronologiquement les unes après les autres, avec des personnages toujours différents d’une nouvelle à l’autre mais toujours attachants. Elles racontent les différentes étapes d’une colonisation d’une planète vierge par des groupes d’humains inféodés à une « multimondiale » (la multinationale d’aujourd’hui grossie à l’échelle galactique), des débuts à sa fin, dans un futur lointain, où l’humanité s’est déjà répandue sur 20 000 mondes. Intercalés entre ces différentes nouvelles, qui font lien entre elles, des textes très courts où on suite l’évolution en parallèle de Lum’en (qui donne le titre au livre), une entité multi séculaire prisonnière dans le sol de la planète, qui sera en fin de compte, *spoiler*. Ces intercalaires sont presque inutiles, les nouvelles se suffisant parfaitement en elles-mêmes pour suivre de façon crédible et prenante, le destin de l’humanité sur cette planète.

J’y vois, dans le contenu de ces nouvelles, une critique du fonctionnement actuel de notre société, transposé dans une société du futur, qui ressemble très fort à la nôtre, malgré son avancée technologique. Une fable écologique dans laquelle l’auteur expose, à mon sens, ses préoccupations très contemporaines concernant la destruction de l’environnement, l’irrespect total de la nature et des formes de vie qui l’habitent et ses conséquences sur l’état d’être humain. Dans son livre, les personnages qu’il y met en scène ne manquent pas d’amour ni de l’envie d’en éprouver mais sont comme ralentis, empêchés par le fonctionnement même de la société humaine soumise aux modes de pensée trop autocentrés, trop uniquement orientés vers l’exploitation des ressources à tout prix, vers la recherche de l’efficacité économique et du rendement d’abord, qui sont les moteurs principaux de la dynamique des grands groupes industriels et financiers, sans égards pour les dégâts environnementaux et sociaux. À cause de leurs pouvoirs toujours sans cesse grandissants et absolutistes, les êtres humains dans leur ensemble en deviennent totalement dépendants et sont entraînés à suivre cette logique du rendement maximal, les amenant à se couper du lien à leur propre sensibilité et à la nature et à vivre de manière artificielle dans des grands ensembles urbains bétonnés, les rendant indifférents à la nature qui les environne. Mais pas que. Tout ce qui pervertit l’esprit humain, les religions, les politiques, les sciences, sont dénoncés. Les personnages décrits dans ce livre sont donc à la fois acteurs et victimes de ce système qu’ils n’ont pas choisi et dans lequel ils sont nés, à l’image de nous tous.

Voici les thèmes en lignes directrices de ce livre pas bien épais et qui se lit rapidement, écrit d’une façon claire, concise et très compréhensible, avec beaucoup de sensibilité, sans rien de la complexité réservé à certains romans de SF trop bardés de savoirs scientifiques, des histoires simples, linéaires, faciles à suivre, pleines d’une mélancolie presque désespéré, sans illusions sur l’humanité, mais pourtant non dénuées d’espoir malgré tout. Car dans l’humanité trop assujettie à la misère et à l’aveuglement, il y a toujours des gens avec une lucidité et une conscience plus éclairée qui ressortent, même s’ils subissent aussi la pression de la société. Une longue balade désenchantée et pourtant enchanteresse, une douce désolation lente et pourtant dynamique, un livre de science-fiction écrit par une sorte de Ray Bradbury en plus moderne et écolo.

Je l’ai acheté sur la foi d’une liste de prix que ce roman a remporté : Prix Julia Verlanger 2015, Grand prix de l’imaginaire 2016, Prix Rosny Aisné 2016, ce qui m’a paru être suffisamment gage de qualité pour que je le lise avec confiance. Sans être un chef d’œuvre, ça s’est bel et bien révélé une belle surprise et des plus intéressantes. Après le début poussif de la première nouvelle qui m’a fait craindre que… et bien, non, les histoires suivantes ont fait prendre son envol au livre et m’ont mieux fait comprendre pourquoi il a obtenu des récompenses.

Laurent Genefort, un auteur de science-fiction inconnu, découvert, et à suivre…

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Forums: Lum'en

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Lum'en".