Les nuits de sept ans
de You-jeong Jeong

critiqué par Pucksimberg, le 2 octobre 2016
(Toulon - 44 ans)


La note:  étoiles
Le meurtre d'une fillette et le lac
Une fillette a été tuée. Son corps est retrouvée au fond de l'eau. Trois hommes sont liés de près ou de loin à ce crime dans le petit village de Seryong, au bord d'un lac surplombé par un barrage. Yeong-je est un homme très violent, qui n'hésite pas à battre sa fille et à violer son épouse pour la punir. Un soir, parce que sa fille a porté les vêtements de sa mère pour s'amuser il la frappe avec bestialité. Effrayée, elle s'enfuit en pleine nuit, en plein brouillard. Heyon-su, ancien joueur de Baseball la renverse malencontreusement alors qu'il était en voiture. Il sort précipitamment pour mesurer la catastrophe. L'enfant n'est pas morte et crie "Papa !" Heyon-su est malheureusement atteint par un problème neurologique qui fait qu'il n'a aucune emprise sur l'une des ses mains, qui parfois ne lui obéit plus. C'est ce qui se produit ! Cette main meurtrière achève l'enfant. il se débarrasse du corps dans l'eau. Seung-Hwan, plongeur et chef du barrage, lors d'une balade nocturne aquatique se retrouve nez à nez avec le cadavre de l'enfant. Il part au plus vite de crainte qu'on le rattache à ce meurtre et par superstition. Ces trois hommes vont vivre avec des souvenirs douloureux. Yeong-je en viendra très vite à soupçonner Heyon-su d'être le criminel. Terrible face à face !

Ce roman est polyphonique. Le lecteur a donc accès aux pensées et aux impressions de plusieurs personnages, ce qui permet de nous éclairer sur l'histoire. L'univers dépeint est véritablement mystérieux, parfois étouffant. L'obscurité prédomine et accentue les mystères liés à cette disparition. Les personnages font de la plongée, ce qui accroît ce sentiment de claustration quand ils sont sous l'eau, dans les profondeurs, et ajoute au climat d'attente. Il y a bien évidemment des histoires secondaires qui s'entremêlent au meurtre initial. L'auteure décrit aussi la psychologie de ses personnages. On en vient à connaître leur cauchemar, leurs hallucinations. Certains passages sont même mâtinés de fantastique. Heyon-su a un fils, Seo-won. Le lecteur commence à s'inquiéter pour lui, lui qui semble en contact avec le fantôme de la fille de Yeong-je.
Le roman a quelques longueurs. L'auteure serait comparée à Stephen King, mais il y a une grande différence dans le traitement du temps. J'ai ressenti parfois de l'ennui, mais cela reste un bon roman noir. Le lecteur prend le temps de se familiariser avec les personnages et le lieu. En quittant ce roman, l'on a vraiment l'impression de quitter un village qui nous est familier tant on imaginait avec précision ce cadre spatial et ses personnages.
Certains individus sont de belles figures tragiques, entre résignation et révolte. Les vengeances sont terribles et la rancoeur ne s'apaise pas tant que le sang n'a pas coulé.
Il s'agit d'un bon roman noir sud-coréen qui s'est très bien vendu dans le pays d'origine de Jeong You-jeong puisque 600 000 exemplaires se sont écoulés et qu'un film a été adapté de ce roman.

Un petit carton rouge aux éditions Decrescenzo : il y a trop de coquilles dirons-nous pour rester poli, mais le hasard fait que toutes ces fautes de frappe s'apparentent à des erreurs d'orthographe ... Il y a aussi des fautes de traduction, "après que",est suivi de l'indicatif, ce qui n'est pas le cas à plusieurs reprises dans le roman. Cerise sur le gâteau : Les 30 premières pages de mon roman sont dans le désordre alors que la numérotation est cohérente. J'ai perdu pas mal de temps à réorganiser le début, à mener mon enquête. En même temps c'est un roman policier ...
J'apprécie tout de même les choix éditoriaux de cette maison qui s'intéresse de près à la littérature de Corée du sud.

Je conseille bien évidemment la lecture de ce roman.