Cousine K
de Yasmina Khadra

critiqué par Moineau, le 27 mars 2004
( - 49 ans)


La note:  étoiles
Fatalité
Dans la 1ère partie, le narrateur nous livre des bribes de souvenirs d'enfance. Il a souffert de l'indifférence de sa mère à son égard et de la préférence de celle-ci pour son frère. " [...] l'aveugle n'est pas celui qui ne voit pas, mais celui qu'on ne voit pas; il n'est pire cécité que de passer inaperçu". Il parle de sa fascination pour cousine K., adorée elle aussi par toute la famille. Cette cousine a beau le mépriser et ne pas manquer une occasion pour le mépriser, il a pour elle de l'admiration mêlée de jalousie. Tous ses efforts pour se faire aimer sont voués à l'échec.
Et puis d'un coup, nous entrons dans sa vie d'adulte. L'écriture est simple, elle semble couler de source. Il énonce ses crimes avec beaucoup de naturel, comme si c'était son destin et qu'il ne pouvait y échapper. "Je ne fais que dériver vers quelque chose qui m'échappe toujours."
Bref, j'ai beaucoup aimé ce livre pour le fatalisme qu'on y rencontre.
Sujet trop profond pour un si court récit 7 étoiles

Ce récit, Cousine K, présente une partie autobiographique de l’auteur Yasmina Khadra. L’auteur connaît l’abandon dès un an, lorsque son père rejoint les rangs de L’ALN. Il en a cinq lorsqu’il trouve son père mort dans la grange, où tous les matins, il rendait visite à un veau nouveau né. Ce matin-là, la petite bête a refusé de s’approcher, terrifiée par le cadavre suspendu au crochet. Les matins et les lendemains de l’enfant sont devenus inutiles et tristes. Il n’est plus retourné à la grange. Puis à 9 ans le jeune Mohamed est envoyé, par son père, à l’école militaire des cadets en Algérie. Pour le garçon, c’est une rupture totale. Il quitte sa famille et se retrouve avec d’autres enfants orphelins ou abandonnés. Quelque chose est mort en sa mère, après la tragédie cruelle et erronée de son mari. Arrogante sous son chignon austère, elle n’a jamais souri à Mahamed. Pourtant, quand Cousine K se lovait dans ses bras, elle se découvrait toute tendresse. Quoiqu’il souffrait de l’absence de son frère Amine, la jalousie le tenaillait lorsque sa mère lisait les lettres de son fils chéri, ou au retour du collège, lorsqu’elle se promenait avec Amine, main dans la main. Dans ces moments-là, elle oubliait qu’elle avait un autre fils et s’en désintéressait tout à fait, au point de ne mettre que trois couverts pour le repas.

Le personnage de Cousine K m’est très antipathique. Alors qu’elle aurait pu passer de doux moments d’amour enfantin avec le jeune héros-narrateur, elle le rejette, et en fait son souffre-douleur, lui qui l’aimait tant, et qui avait toujours vécu, malgré lui, la solitude et le rejet. Déception majeure qui le mènera à des troubles névrotiques. Serait-ce la raison qui occasionnera le drame de la fin? Tant de choses se cachent derrière une enfance malheureuse, le manque affectif lui a été sûrement néfaste. Le roman beaucoup trop court, à mon goût, m’a laissée sur ma faim d’en connaître davantage. Écrit avec sincérité et talent, c’est un roman poignant et sombre qui pousse un jeune garçon à la folie meurtrière.

Saumar - Montréal - 90 ans - 5 janvier 2011


KHADRA TOUJOURS AUSSI JUSTE! 7 étoiles

L’écriture de Yasmina KHADRA est toujours aussi belle, toujours aussi juste, littéralement «sculptée» au couteau !.. On a envie de le lire juste pour sa façon d’écrire, ou bien devrais-je dire de raconter…

Les personnages toujours aussi bien décrits, et toujours aussi intéressants, malgré le très court récit, ne manquent ni de profondeur, ni de psychologie, et on aimerait sans aucun doute apprendre à mieux les connaître, car finalement on sait très peu de choses de cousine K (qu’est-ce qui la pousse à être aussi méchante et qu’advient-il exactement d’elle après sa «chute» dans le puits) et du héros du roman, (pourquoi est-il si soumis, pourquoi aime-t-il sa cousine d’un amour sans limites)…

Mon seul regret est que le livre soit aussi court, car franchement on en redemande!..
Pour ceux qui n’ont jamais lu de livre de KHADRA, ce court récit constitue sans aucun doute un très bon début pour découvrir son œuvre…

Un livre à lire.

Septularisen - Luxembourg - 56 ans - 29 août 2007


Banaliser le meurtre 3 étoiles

Le résumé nous apprend que le narrateur succombe à une folie meurtrière. C’est bien cela. Voilà, il n’y a rien de plus dans ce court texte. J’ai eu beaucoup de difficulté à avaler le personnage de la petite fille méchante en si peu de pages. De même, pour la supposée intense frustration de son jeune assassin. Serais-ce une justification de la violence ? Un roman trop petit pour un drame d’une telle envergure. Heureusement, la jolie plume de Khadra est toujours au rendez-vous.

Aaro-Benjamin G. - Montréal - 54 ans - 21 août 2007


De la frustration à la folie meurtrière 7 étoiles

J’avais apprécié "Les hirondelles de Kaboul" et "A quoi rêvent les loups". Pour la violence du style et la justesse des mots. Je n’ai pas été déçue avec "Cousine K", j’y ai retrouvé la même intensité d’écriture. Terrible histoire que celle de ce jeune enfant délaissé par sa mère qui lui préfère son fils aîné (qui est plus beau, plus intelligent, qui réussit tout mieux, etc), qui espère tellement que sa cousine lui donnera l’amour dont il a besoin et dont il deviendra le souffre-douleur. Cette fille est une véritable teigne qui brisera toutes les illusions du petit garçon. La frustration s’installe, elle se fait de plus en plus forte. Progressivement aveuglé et trop meurtri par les brimades et la souffrance, l’irréparable (un meurtre) sera commis, comme si une boucle devait être bouclée (le père de l’enfant avait été tué "par erreur"). Plus tard, il en parle, il nous raconte, il partage avec nous ces longs moments de détresse et de solitude. C’est un récit poignant, empli d’émotion, dans lequel Yasmina Khadra nous livre, une fois de plus, toute la magie de son langage, si riche, si habile à décrypter les pensées les plus obscures de l’esprit humain. Sa manière de nous livrer le manque d’amour vécu par cet enfant est profonde, ajoutant au caractère dramatique de la situation la touche nécessaire de sensibilité.

Sahkti - Genève - 49 ans - 22 avril 2004