Une mouche en novembre
de Louis Gagné

critiqué par Libris québécis, le 20 août 2016
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Un ingénieur congédié
En automne, les mouches viennent se réfugier entre les fenêtres doubles. Elles ressemblent à beaucoup d’humains qui ne parviennent pas à prendre leur envol. Ils observent le monde ambiant de leur quartier plongé dans un éternel hiver. Le héros, Boniface Saint-Jean, mène ce genre de vie depuis qu’il a été reviré de son poste d’ingénieur.

Il habite la ville fictive de Ludovica. Le lecteur reconnaîtra Québec avec son cimetière anglican en plein centre-ville où la stèle d’Abigaël Valmos (1968-2002) attire son attention. La perte de son emploi va-t-elle le transformer en personnage de cimetière sans y être inhumé ? Pourtant Boniface est un homme cultivé dont les livres de sa bibliothèque lui tiennent lieu d’amis pour se reposer de la décadence de notre société moderne. Il est heureux de dormir en pyjama et de savoir faire un nœud de cravate digne de ce nom. Il ne faut pas chercher de jeunes qui partagent cette habitude et ce savoir vestimentaire. C’est à travers ces caractéristiques qu’il apprécie sa vie empreinte d’art et d’élégance.

Avant d’être un nom sur une stèle, il observe ses semblables et les événements qui les touchent tels que la disparition d’une fillette, l’accouchement d’une femme à la gare. Rapidement il se rend compte que la ville porte le poids de tous ces esseulés au milieu d’une foule agitée. Des esseulés qui le sont devenus suite aux conséquences d’une existence malencontreuse. Ce sont des gens sans attaches comme ces chiens sans maître qui circulent au cœur de la ville. C’est avec des faits divers qu’il meuble son présent. En somme, il observe la prison urbaine peuplée d’âmes en peine, qui n’ose pas échapper à la laisse qui les retient à leur port d’attache. On tue le temps pour ne pas mourir d’ennui, faute d’être capables de se réinventer.

Ce roman d’observateur averti se déroule sans faire de vagues même si l’auteur a imaginé pour les lecteurs des rebondissements intéressants mais sans conséquences. La technique d’écriture est excellente alors que l’art romanesque défendu par Louis Gagné souffre d’une apathie qui ne peut soulever l’intérêt.