Et je serai toujours avec toi de Armel Job

Et je serai toujours avec toi de Armel Job

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Pascale Ew., le 2 mai 2016 (Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 7 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 446ème position).
Visites : 4 681 

L'étranger, cristallisateur de relations

En 1995, dans le petit village de Wermont, dans les Ardennes belges (comme d'habitude), Teresa vit avec ses deux fils de 21 et 20 ans, Tadeusz et André. Son mari est mort un an auparavant d'un cancer. Un jour, débarque chez eux Branko Hrastov, un réfugié croate tombé en panne devant chez eux. Teresa, très croyante, est persuadée que c'est son mari qui le lui envoie car certains signes ne trompent pas, mais ses fils ont des accueils très différents en fonction de leurs relations familiales. Quelques temps plus tard, une jeune fille est assassinée dans le village... L'enquête va soulever le voile sur le passé de Branko
Aucune surprise : le style Armel Job est bien présent, mais il se passe si peu dans ce roman !!! L'enquête se déroule au tempo de Maigret, sans aucun rebondissement ni vrai suspense. C'est sympathique et ça se lit facilement, sans plus. Aucun thème supplémentaire ne ressort vraiment. Le livre se présente en alternance écrit par l'un ou l'autre frère.

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Les éditions

  • Et je serai toujours avec toi [Texte imprimé], roman Armel Job
    de Job, Armel
    R. Laffont
    ISBN : 9782221191408 ; 19,00 € ; 11/02/2016 ; 306 p. ; Broché
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Encore une merveille signée Armel Job

9 étoiles

Critique de Catinus (Liège, Inscrit le 28 février 2003, 72 ans) - 25 décembre 2019

Nous sommes fin 1995 dans une bourgade de Wallonie. Teresa, la quarantaine, d’origine polonaise, a eu deux fils avec son mari maintenant décédé : Tadeusz qui est à la tête d’une brasserie locale et André toujours étudiant en mathématique. Un soir, un homme du nom de Branco, demande de l’aide car il est en panne de voiture. Il est d’origine croate mais se débrouille pas mal en français. Teresa accepte et croit – ou plutôt est persuadée – qu’il est envoyé par son défunt mari. Il y a des signes qui ne trompent pas et puis Teresa est catholique, très catholique. Peu de temps après, Suzanne, une jeune femme du coin, est retrouvée morte, assassinée. En alternance, Tadeusz et André nous racontent cette histoire magnifiquement menée – une fois de plus ! - par Armel Job.

Extraits :

- Une mère, pour son fils, a quelque chose de sacré, qui la retire du milieu des femmes. Un fils ne peut pas accepter que sa mère reste celle qu’elle était sans doute avant qu’il n’apparaisse lui-même, un simple être humain voué, comme tous les êtres humains, à la solitude, en quête d’un regard, d’une parole, d’un geste de compassion.

- Pour toi, peut-être, André, et pour Tadeusz aussi sûrement, vous ne croyez à rien. Vous êtes tellement intelligents. Et ça ne vous suffit pas. Vous voulez que tout le monde soit comme vous. Vous n’avez même pas pitié de nous, les faibles d’esprit, vous voulez nous enlever nos illusions. Ça vous fait sourire que j’aille à la messe, que je mette un cierge à la Vierge noire, toutes les semaines. Pauvre niaise, pensez-vous, qui s’imagine maintenant que la Madone de Medjugorje lui envoie un message pour la récompenser de sa fidélité ! Eh bien, votre monde sec, ton monde de chiffres et de calculs, il ne me fait pas envie. Je préfère le mien, où l’on croit que les bougies ont de l’effet pour guérir les enfants – j’en ai brûlé assez quand vous étiez malades- ou pour apaiser un chagrin quand quelqu’un est mort. Je sais bien que ce n’est pas sûr, je ne suis pas une idiote, je sais bien que ce sont peut-être de rêveries, mais je préfère vivre avec ces « peut-être » qu’avec ces « sûrement ».

- De nos jours, on fait passer les gens qui croient pour de abrutis. L’athéisme, qu’est-ce que c’est pourtant ? Une croyance comme les autres, pas plus assurée, puisqu’au bout du compte, personne ne sait ce qu’il en est de l’explication du monde.

- Je me demande s’il y a une seule affection qui arrive à la cheville de celle que peuvent se porter deux frères ou deux sœurs à peu près du même âge.

Du bon Armel Job

10 étoiles

Critique de Faby de Caparica (, Inscrite le 30 décembre 2017, 62 ans) - 30 janvier 2019

Bonjour les lecteurs….
Saperlipopette .. un livre d'Armel Job qui était perdu au fin fond de ma Pal gargantuesque!!!
Il était temps que je le fasse remonter à la surface!
C'est avec délice que je me suis plongée dans ce huis-clos familial.
Les Ardennes belges 1995. Thérèsa est une jeune veuve d'origine polonaise. Elle est la mère de deux jeunes hommes d'une vingtaine d'années et s'accroche à une phrase prononcée par le défunt pour continuer à donner un sens à sa vie.
Ces quelques mots " Et je serai toujours avec toi" lui permettent de se maintenir la tête hors de l'eau et de guetter un signe de l'au-delà.
Ce signe apparait un jour d'automne sous la forme d'un Croate qui tombe en panne devant chez elle et vient lui demander l'asile.
La jeune veuve y voit immédiatement un signe. Ses deux fils par contre voient d'un mauvais œil l'apparition de cet intrus.
Peu de temps après, un meurtre est commis au village que l'on s'empresse de mettre sur le dos de l'étranger … c'est tellement facile… mais le livre ne serait pas signé Armel Job si il n'y avait pas quelques subtilités au détour de chaque page.
L'histoire est racontée par André et Tadeusz, les deux fils de Thérèsa. Chacun donnant son point de vue des évènements qui vont découler de cette rencontre.
C'est bon.. c'est du Armel Job dans toute sa puissance.
Nous sommes happés dès les premières pages de ce roman noir. Le lecteur s'engouffre dans une brèche, suit une piste et puis non… un détail, on s'égare, on repart vers d'autres orientations.
Telle est la subtilité de l'écriture de ce grand auteur belge qui sous le couvert d'une écriture simple et bien de " chez nous" , distille un conte complexe.
On y retrouve les relations " mère / enfants" , des réflexions sur la religion encore bien présente dans nos petits villages, des réflexions sur nos regards par rapport à l'autre, l'étranger, le pouvoir de pardonner et enfin une pincée de référence à la guerre et ses violences.
Un très bon suspense psychologique mais pas que … A LIRE

Bien, lent mais bien.

7 étoiles

Critique de Palmyre (, Inscrite le 15 avril 2004, 62 ans) - 1 juillet 2017

Je ne connaissais pas Armel Job (pourtant un écrivain belge, honte sur moi!) mais j'ai apprécié ce roman lent c'est vrai et à part un crime, il ne s'y passe rien d'extraordinaire Mais j'ai aimé cette histoire racontée à deux voix, les faits sont ainsi exposés du point de vue des deux frères, l'un puis l'autre et ainsi tout au long du livre ce qui apporte un plus au roman à mon avis.

« En admettant que Dieu n’ait rien à se reprocher »

9 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 6 mars 2017

Armel Job nous entraîne dans une fiction qui nous révèle de manière vivante, parlante et concrète un quotidien dans lequel on vit avec ses contradictions, ses horreurs et ses compromis. Comme le dit un des personnages secondaires, la justice et la vérité sont deux choses différentes.

Ce roman d’une grande accessibilité est raconté à deux voix, mais aussi deux points de vue, ceux de deux frères qui s’affrontent au travers de leur caractère opposé. Il décrit dans une atmosphère lourde une réalité familiale où les personnages sont confrontés à leur destin et où la maladie, la guerre, les croyances et les désirs s’entrechoquent.

L’auteur aborde aussi des thèmes comme la Foi, les valeurs familiales et de fonctionnement de la justice et il tente de laisser croire, presque jusqu’au bout, que l’amour pourra sublimer les personnages jusqu’à leur donner un avenir meilleur.

Un roman profond et pour qui, comme moi, a du sang ardennais, laisse des traces et une forte émotion.

Plus c'est trop !

9 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 30 novembre 2016

Teresa est une fraîche et jolie veuve d'origine polonaise. Elle habite en Belgique entourée de l'amour de ses deux grands garçons. l'un est aux études à Bruxelles, l'autre a repris les activités de la brasserie familiale, la Cochepatte.
Avant de mourir son mari lui avait fait cette promesse "je serai toujours avec toi"... il n'en faut pas plus pour que la pieuse Teresa guette les signes !
Et un jour un homme à l'accent slave tombe en panne de voiture juste devant la maison. Il sifflote un air de Tannhäuser (opéra préféré du défunt), il se signe avant les repas... il n'en faut pas plus pour que son arrivée soit considérée comme la prédiction "et je serai toujours...".

Qu'en penser ?
C'est un court passage au début du livre qui a été comme un déclic. Un écrivain qui parvient à trouver un ton aussi juste ne peut que faire du bon et je me permets de vous le reproduire ici
"J'étais un piètre danseur. Je ne pouvais me risquer que dans des slows langoureux. Pour aimer la danse elle-même, il faut une sorte de consentement à son propre corps Je ne l'ai jamais eu Je me suis méfié de cette machine maladroite, brutale, rebelle à tout. Ce qui me plaisait dans la danse, ce n'était pas mon propre corps mais le corps de la femme.
La danse rompt l'embargo qui frappe autrement la chair féminine. Un bref moratoire, pendant lequel on peut toucher.
Ce que je pouvais frémir quand, en passant mon bras au creux de sa taille, je sentais du bout de mes doigts le tissu de la robe déraper légèrement sur sa doublure de satin ! Je respirais son parfum, son bras flottait sur mon épaule, une mèche de ses cheveux frôlait ma joue, elle pressait innocemment la coque de son sein contre ma poche de poitrine.
Pour moi la seule sensualité qui ait jamais valu, c'est celle de cette proximité délicate. Plus c'est trop ! "

Donc voici le passage qui m'a accroché à ce roman bien construit, qui parvient à éviter les pièges du "facile" et qui réussit l'exploit de délivrer un message nuancé mais puissant.

Faire payer… pour le Mal

10 étoiles

Critique de Deashelle (Tervuren, Inscrite le 22 décembre 2009, 15 ans) - 10 novembre 2016

La moisson sera bonne ! Par des détours romanesques bluffants, avant d’atteindre le cœur du mal, suite à un patient travail d’anatomie humaine, Armel Job séduit une fois de plus par la subtilité de son propos et la profondeur de ses analyses ! Comme toujours, avec Armel Job, on se promène longtemps avant de découvrir le but de la promenade. Le jeu de piste en vaut la peine, il nourrit la curiosité du questionnement, alimente notre soif de savoir, qui sait, nous enivre d’humanité retrouvée! C’est ce qui fait la profondeur du roman et lui donne chaque fois une perspective inattendue.

Le titre d’abord : on se rend vite compte qu’il s’agit des dernières paroles de consolation d’un mari encore jeune, à sa femme avant de s’éteindre des suites d’un cancer. Titre déroutant puisqu’il ne cerne pas le nœud de l’histoire. La femme qui va prendre le deuil n’est pas n’importe quelle femme. Elle est étrangère. D’origine polonaise, Teresa s’est installée en Belgique par mariage arrangé à l’âge de 18 ans avec Jacques Broncart, brasseur de son état.

« Le passé n’est jamais mort, il n’est même pas le passé » prend soin de prévenir Armel Job en empruntant à William Faulkner. Nous sommes en Ardennes, dans un petit village en 1996.
Il est beaucoup question d’étrangers dans l’histoire. Il y a cet étranger, un réfugié qui débarque insidieusement dans cette famille sans père. Branko, qui voudrait désespérément pouvoir rester étranger à son passé et à lui-même. Teresa la digne veuve abandonne soudainement ses habits de deuil malgré sa dévotion aux usages et à ses croyances religieuses. Sa générosité de cœur la fait tout à coup refleurir et choisir la vie. Question intéressante : a-t-elle été même vraiment aimée par son mari ? Est-elle l’otage d’une foi chrétienne exigeante ? Est-elle la proie d’un usurpateur venu se fabriquer une nouvelle vie ? Ses deux fils la surveillent.

« Vous ne supportez pas que je sois heureuse. Vous n’avez jamais connu qu’une mère effacée, fade, juste bonne à vous servir. Vous avez décidé que le seul être qui existe dans la famille, en définitive, c’était votre père. Votre père mort plus exactement, parce que, vivant, il ne vous intéressait pas plus que moi. Vous lui avez dressé un monument avec sa statue dessus, et moi dessous, enterrée ; je devais y passer avec le défunt comme les épouses de maharajas ».

C’est eux, qui tour à tour narrent l’histoire. Ils sont très bien campés, ces Romulus et Remus, très divisés sur leurs relations réciproques après une jeunesse commune pourtant radieuse. Avec deux Œdipe de taille à surmonter, ils se mettent à juger leur mère… et cet imposteur, un assassin peut-être ? Vont-ils assassiner sa nouvelle vie ? Tadeusz et son frère André sont ceux qui sont cachés au fond de chacun de nous, vont-il se transformer en justiciers? Quelles réponses lumineuses leur mère va-t-elle leur opposer?
«Votre monde sec, ton monde de chiffres et de calculs, il ne me fait pas envie ; je préfère le mien, où l’on croit que les bougies ont de l’effet pour guérir les enfants ou pour apaiser le chagrin quand quelqu’un est mort. Je sais bien que ce ne sont peut-être que des rêveries, mais j’aime mieux vivre avec ces « peut être » qu’avec vos « sûrement ». »

Est-ce que le lourd passé de l’étranger qui a fait la guerre en Yougoslavie doit empêcher la générosité à son égard? Il avoue avoir pratiqué lui-même l’indicible violence, il a contribué à la folie destructrice. Peut-il y avoir rédemption?
« Le pardon est certainement l'une des plus grandes facultés humaines et peut-être la plus audacieuse des actions, dans la mesure où elle tente l'impossible - à savoir défaire ce qui a été - et réussit à inaugurer un nouveau commencement là où tout semblait avoir pris fin. » (Hannah Arendt)

Un meurtre sexuel a été commis dans le village, va-t-on profiter de l’occasion pour se saisir de Branko comme bouc émissaire? Au besoin, plus cyniquement encore, Rendre une hypocrite justice, punir le crime humanitaire en vengeant un crime passionnel ? Comme tout cela est bien monté! Le suspense est ficelé avec sensibilité, intelligence et beauté romanesque. Et il y a ce chien dans l’histoire, qui ne ment jamais : dans ses yeux, on ne lit que l’amour! Le seul mot qui compte ?

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