La mort d'un apiculteur
de Lars Gustafsson

critiqué par Septularisen, le 26 avril 2016
(Luxembourg - 56 ans)


La note:  étoiles
UNE LEÇON DE VIE AU SEUIL DE LA MORT!
L'histoire de ce roman se passe en Suède, à Näset, près des villages de Vretarna et de Bodarma dans une petite ferme isolée à la campagne.
Lars Lennart Westin est un ancien instituteur de travaux manuels aujourd’hui à la retraite et également divorcé. Afin de subvenir à ses besoins, sa maigre pension d’instituteur étant quasiment reversée sous forme de pension alimentaire à son ex-femme, il est devenu, un peu par la force des choses, apiculteur.

L.L.W. est un solitaire endurci, il a peu d’amis, quasiment pas de famille, et vit de manière très frugale avec son chien dans sa maisonnette de campagne. Un jour suite à des douleurs persistantes dans le dos, il va faire des examens approfondis à l'hôpital. Calculs rénaux ? Lumbago ? Inflammation de la prostate ? Cancer ?

Quand la lettre avec les résultats des prélèvements sanguins et de la biopsie arrive chez lui, L.L.W. décide de donner une chance à la vie... Et de ne pas la lire. Il la brûle alors sans l'ouvrir, et continue de vivre comme si de rien n’était…

Ce livre est très déconcertant. En effet, si Lars GUSTAFSSON utilise un procédé très simple et déjà souvent utilisé, celui de petits carnets (ici le bleu, le jaune, et le déchiré), retrouvés après la mort du héros. Lars GUSTAFSSON en profite pour lancer des réflexions, des sentences, des vérités, des images, des sous-entendus, des digressions (parfois un peu longues, il faut le dire...), des anectodes, des comparaisons, des réglexions philosophiques... Le tout dans un apparent désordre et de façon très décousue, mais servi toutefois par une très belle écriture, presque de la poésie, facile à lire et très prenante. Le livre ne faisant que 180 pages, il se lit en quelques heures.

Il mérite toutefois que l’on s’y intéresse plus en détail, en effet, si l’on gratte un peu en dessous du « vernis » de l’histoire romancée, ces mémoires deviennent alors des réflexions sur la nature des relations humaines. Ainsi, le héros du livre s’interroge tour à tour sur l’amour qui lie deux êtres, le phénomène de la séduction, sur la douleur et la souffrance, sur l’illusion qu’est la vie, sur la solitude de l’enfance, la vie de famille , sur l’existence (ou la non existence de Dieu), sur la vie, et bien sûr… La mort.
Le tout avec une acuité et une vision humaniste dépasse de loin le simple cadre d’un roman. Finalement, le cancer dont souffre le héros peut aussi se voir comme métaphore du progrès, des utopies, des solutions sociales…
Une leçon de vie au seuil de la mort en quelque sorte!

Le 3 avril dernier s’est éteinte la voix de Lars GUSTAFSSON, une des plus grandes de Suède. Très (trop) méconnu dans nos pays, et même parfois dans le sien, c’était pourtant un véritable monument de la littérature de son pays. « La mort d’un apiculteur », paru en 1978 est son roman le plus connu, d’ailleurs souvent considéré comme son chef d’œuvre. J’avais déjà lu ce livre en 1989, et j’en gardais un très bon souvenir. Je m’y suis donc replongé, histoire de rendre hommage à cet écrivain qui venait de disparaître, et une chose est sûre, je souhaite au plus grand nombre d’entre vous de lire ce livre et de découvrir cet écrivain !...

Rappelons que Lars GUSTAFSSON a été, entre autres, le lauréat du Prix Nordique de l’Académie Suédoise (surnommé «Le petit Prix Nobel») en 2014, du Prix Thomas MANN (Prix de l’Académie Bavaroise de Beaux-Arts) en 2015 et le lauréat du Prix International Nonino en 2016. Son nom a été proposé à de nombreuses reprises pour le Prix Nobel de Littérature.