Sorties de secours
de Joyce Farmer

critiqué par Blue Boy, le 13 mars 2016
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Déambulations finales
« Sorties de secours » est le récit des quatre dernières années de Rachel et Lars, un couple d’américains vivant à Los Angeles. Leur fille, Joyce Farmer, s’est attelée à raconter leur lente déchéance en relevant avec tendresse les moindres détails de leur quotidien, leurs petites manies, leurs chamailleries et leurs angoisses devant le souffle de la mort.

La fin de vie serait-elle le sujet en vogue dans le domaine de la « bande dessinée d’auteur » ? Quelques mois auparavant Gallimard publiait l’excellent Est-ce qu'on pourrait parler d'autre chose ? de Roz Chast, qui narrait également les derniers jours de ses parents. A son tour, Delcourt réédite cette œuvre de Joyce Farmer, déjà publiée par Actes Sud en 2011 sous le titre Vers la sortie. L’auteure est présentée comme la pionnière de la BD féministe underground. Sur la couverture est mise en exergue une louange de Robert Crumb qui place "Sorties de secours" sur le même plan que Maus, rien de moins !

Certes, on est bien dans la même veine autobiographique où prime le réalisme des situations, mais la ressemblance s’arrête là. Si indéniablement Joyce Farmer y a mis tout son cœur, son hommage peine à convaincre véritablement. Le récit est lesté par moult longueurs, sans doute dignes d’intérêt pour l’auteur, ses proches et son entourage, mais hélas plus qu’anecdotiques pour le lecteur, sauf peut-être pour ceux qui auront vécu une telle expérience. L’ennui s’installe assez vite, même si l’histoire suscite davantage l’intérêt dans les dernières pages. On aurait apprécié une narration plus structurée, plus épurée, alors qu’ici les mêmes situations semblent se répéter à l’infini…

Le dessin noir et blanc compense avec ses hachures si caractéristiques du comics US alternatif et par un certain souci du détail les maladresses plus flagrantes dans les postures, les visages des personnages, pire encore, les regards peu expressifs, ce qui est plus gênant dans un style qui se veut réaliste.

Même si on comprend bien qu’ici, c’est l’histoire qui prédomine et la sincérité avec laquelle elle est racontée, sans pathos, mais tous ces manquements constituent malheureusement un frein à une émotion qu’on aurait aimé ressentir. Oui, bien sûr, on peut y trouver quelques passages touchants - hélas trop rares -, mais globalement on a du mal à se sentir impliqué, quand bien même on reste impressionné par le courage et l’abnégation dont a fait preuve l’auteure dans l’accompagnement de ses parents jusqu’au seuil de leur mort.