Relation Cheap
de Elosterv (Scénario et dessin), Davy Mourier (Scénario et dessin)

critiqué par Blue Boy, le 20 février 2016
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
L’amour et ses bugs
Davy Mourier et Elosterv se sont connus sur le réseau. L’idée leur est venue de mettre en images leur rencontre virtuelle dans cette BD tout en humour et empreinte d’une tendresse qui ne veut pas dire son nom. Sont évoqués l’amour, le sexe, le couple, et toutes ces sortes de choses… bref, la vie quoi !

Une puce électronique en forme de cœur : la couverture résume bien cette petite BD récréative à quatre mains, celles de Davy Mourier et d’Elosterv. Le premier est connu chez les bédéphiles pour sa série drolatique « La Petite Mort » mais aussi chez les geeks pour ses émissions sur Nolife, la seconde est une blogueuse à l’humour trash, qui a collaboré à des projets pour Delcourt, Fluide glacial ou encore Vraoum. Elosterv est une féministe du XXIe siècle, autrement dit une féministe qui ne sait pas qu’elle est féministe et d’ailleurs semble s’en moquer complètement.

Objet hybride en partie autobiographique, « Relation Cheap » (jeu de mot sur le terme anglais « relationship » signifiant « relations », transformé ici en « relation bon marché ») raconte sur un objet « à l’ancienne » (le support papier, agrémenté ici d’une classieuse impression dorée pour les circuits imprimés) la rencontre puis les échanges via Internet d’un gars et d’une fille, tous deux bédéastes « connectés », entre drague virtuelle et discussion professionnelle. Est-il question ici de la naissance d’une tendre idylle ? Que nenni, damoiselles et damoiseaux ! Car à l’heure de Youporn, le romantisme fait juste figure de vieille lune. Il est à l’amour ce que la lettre postale est au chat. Qu’on se le tienne pour dit !

Entre ces échanges « e-pistolaires » de deux cœurs célibataires derrière leurs écrans viennent se glisser quelques histoires courtes et autres intermèdes, rappelant la technique narrative utilisée dans « la Petite Mort ». Sous un dessin simpliste et « mignon », le propos est trash, désabusé, parfois même émouvant comme dans « Amore », une bluette tragique suivie immédiatement par une mise en abyme qui instaure une distance pour le moins abrupte. Amis de la poésie, gothiques corbeaux et bilieuses chauve-souris, vous êtes prévenus : ravalez vos larmes ou bien fuyez ! Mais malgré l’apparente gaudriole et la superficialité de l’exercice émerge l’air de rien une réflexion intéressante, très révélatrice de notre cyber-époque, sur les rapports amoureux et la drague en ligne.

Au final, l’objet est sympathique, et si l’idylle en question n’a pas vraiment eu lieu entre les deux bédéastes, il n’est pas dénué de tendresse malgré l’humour gentiment vachard des deux protagonistes.