Dedans ce sont des loups
de Stéphane Jolibert

critiqué par Kilis, le 1 février 2016
( - 78 ans)


La note:  étoiles
D’une violence noire, d’une humanité à faire fondre la neige.
C’est un roman noir. Mais pas que. Il y a de la violence, du sexe, du sang et des morts à la pelle.
Soit, c’est un roman noir. Mais.
Mais d’une noirceur qui tiendrait de la noirceur du conte… ou du mythe.
Qu’importe. Ce qui frappe ici c’est l’atmosphère incroyablement prégnante. Car si l’écriture de Stéphane Jolibert peut être qualifiée d’alerte et d’inventive, son principal atout réside dans son magistral pouvoir d’évocation. La description des paysages enneigés, la singularité des lieux comme « Le Terminus » (fabuleux bordel du bout du monde) ou la distillerie clandestine du vieux Tom, sans oublier les particularités des différents personnages, tout confère à créer un climat envoûtant. Dès lors, on lit « Dedans ce sont des loups » comme on regarderait un film des frères Coen ou, plus près de nous, de Bouli Lanners.
Le récit se construit autour d’une poignée de personnages singuliers, qui se croisent et se recroisent fortuitement dans un lieu indéfini et sauvage, un coin hostile oublié du reste du monde et où, huit mois par an, la neige blanchit toutes traces : des pas furtifs des loups aux empreintes des hommes morts ou vifs.
Chacun a sa raison secrète de se terrer là. Les informations sont habilement distillées au lecteur qui prend grand plaisir à démêler les fils d’un maillage complexe qui lui réserve bien des surprises.
C’est un roman noir. Une sombre histoire de vengeance. Mais pas que. Quelques scènes plus tendres ou plus intimes et d’autres franchement burlesques viennent alléger bien à propos l’oppressante tension montante.
L’allégorie des loups traverse superbement le roman et ne manque pas de nous interpeller sur les misères et grandeurs de la condition humaine. Un questionnement toujours bien actuel.
Bref, d’une belle efficacité : un roman plein de morts et plein de vie.