Le bleu de la nuit
de Joan Didion

critiqué par Marvic, le 22 janvier 2016
(Normandie - 65 ans)


La note:  étoiles
"Ce n'était pas censé lui arriver"
Joan Didion a vécu l'impensable, l'inadmissible, la mort de sa fille Quintana.
Meurtrie par les deuils de ses amis, des enfants de ceux-ci, par celle de son mari, elle nous confie ses souvenirs, ses questionnements, ses réflexions sur la vie, la mort.
"...il n'est pas un seul jour de sa vie où je ne la revois pas."

Âgée de 75 ans, elle se souvient de l'arrivée de "Q" dans sa vie ; Quintana Roo, une terra incognita au Mexique.
Elle se souvient du coup de téléphone lui annonçant qu'un bébé l'attendait à la clinique. Et si elle n'avait pas été à la maison, et si elle n'avait pas entendu le téléphone…
Elle confie l'angoisse de l'adoption, la peur de ne pas être à la hauteur, le doute d'être une maman responsable, mais aussi le bonheur d'avoir partagé toutes ces années avec elle.
"Comment pouvait-elle imaginer que j'étais capable de prendre soin d'elle ?"
"Et si je me révèle incapable d'aimer ce bébé ?"

Elle raconte la vie originale qu'elle a offert à son enfant, l'emmenant à travers le pays sur les tournages de films, mais aussi l'appréhension des visites de l'assistante sociale, la hantise que sa maman biologique se manifeste.
"Une enfance privilégiée ; c'est un jugement, une opinion, une accusation ;
"privilège", c'est une notion à laquelle- quand je pense à tout ce qu'elle a enduré, quand je songe à ce qui allait arriver – j'ai un peu de mal à adhérer."
Sa fille, après de longs séjours à l'hôpital finira par mourir d'une hémorragie cérébrale. Le choc quand elle comprend qu'il n'y aura pas de mieux, qu'il n'y aura pas de guérison.
"...j'ai soudain compris : il n'y aurait pas d'unité de transition. ...autrement dit, elle était mourante. Je savais désormais qu'elle était mourante."

Un témoignage douloureux, sans continuité, sans chronologie, où l'auteure a besoin de "parler" dans sa solitude, ( "Qui prévenir en cas d'urgence ?"), à des gens qui ne seraient pas condescendants ou trop proches ou affectivement impliqués, comme si elle voulait expliquer, comprendre aussi la vie ;
Je voudrais essayer à nouveau de vous parler de façon directe."

Les répétitions, les redondances, à la manière d'un langage parlé, n'en font pas une lecture agréable. Cela ressemble plus à des réflexions notées telles quelles sur le papier pour faire partager ses joies, ses douleurs, et sa solitude de femme qui a repoussé "ses limites, au-delà de l'endurance".