À la recherche de New Babylon
de Dominique Scali

critiqué par Libris québécis, le 9 janvier 2016
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
I have a dream
L’Ouest américain a fasciné les enfants de ma génération. Quel plaisir de voir un film western dans la grande salle de l’école des frères par un après-midi d’automne pluvieux ! Buffalo Bill crevait l’écran devant nos yeux ébahis. Nous nous projetions dans ce personnage sans peur et non sans reproches vu sous l’angle d’aujourd’hui. La conquête de l’Ouest a attiré de nombreuses personnes désireuses de se donner une seconde chance dans la vie. Mais un milieu hostile se conjugue mal avec le rêve. La mort attend son heure. On ne peut la fuir, mais seulement choisir l’arène où nous voulons qu’elle se présente.

Mourir à ce que l’on est pour ressusciter dans un monde merveilleux au cœur d’une nature sauvage qui n’espère qu’à être domptée par le chasseur en quête d’une civilisation idéale. Construire une ville sans contraintes où s’exerce une totale liberté dans une région où l’or s’offre comme le viatique de la rédemption. Les mormons ont compris le concept. Ils sont descendus du Nord pour partager leur foi à la pointe du fusil.

Apparaît dans ce contexte le révérend Aaron, qui se révèle finalement le héros du roman de Dominique Scali. Un soi-disant homme de Dieu qui se sent plus à sa place dans un bordel que dans l’église. Un pasteur qui s’intéresse à tous et à chacun au cœur même de leur quotidien. Avec son livre de prières, il parcourt tous les États de l’ouest en suivant la marche vers la New Babylon. Sans intérêt pour l’argent, il observe dans les villages, même les plus reculés, comment se trame le rêve américain, obligé de se colleter avec celui des Apaches et des Espagnols du Sud qui, eux aussi, cherchent à se construire un paradis sur un terrain contaminé par le mal. Le pasteur suit en particulier le cheminement de Russian Bill en tentant de décortiquer sa façon d’être, qui doit l’amener à fonder la ville parfaite avec Pearl Guthrie qu’il a marié 30 fois, soit dans chacun des villages où ses bottes l’ont poussé. En fait, il examine la conduite de tous ceux qui croisent sa route, des gens qui croient que le bonheur pend à leur ceinture. Il faut parler par la bouche de son canon, comme a déjà dit Frontenac, un gouverneur de la Nouvelle-France, pour caresser le mythe d’une grande cité. Et surpris est le révérend de voir que la vie tient à lui dans un monde où il sied que les hommes enfreignent les lois divines. Mais l’or et le désert concourent davantage à la perte de ces marginaux qui fuient les paradis perdus du Nord des États-Unis.

La jeune Dominique Scali, née en 1984, a produit une œuvre achevée. Son analyse du rêve américain montre toute la fragilité d’un peuple qui croit encore pouvoir refaire le monde. « I have a dream », disait Martin Luther. Il répétait ce que des millions d’Américains ont dit avant lui. En somme, ce pays manque de consensus. La guerre de sécessions perdure toujours à travers d’autres motifs.
C’aurait pu être un bon roman de western si… 5 étoiles

… l’auteur avait un tant soit peu respecté la chronologie.
Il ne s’agit pas ici de flash-back qui pourraient se justifier, mais de séquences dans le désordre. Je n’en ai vraiment pas compris l’intérêt et ça a complètement gâché ma lecture.

« Le révérend Aaron » est le personnage que l’on retrouve plus ou moins partout dans ce roman, mais on ne peut pas vraiment le considérer comme LE personnage principal.

Le roman est découpé en quatre parties :
- Charles Teasdale (1880, 1873, 18861, 1849, 1866,,…), la partie que j’ai trouvé la plus ennuyeuse et la moins « chronologique »
- Pearl Guthrie (1881, 1874, puis plus ou moins dans l’ordre chronologique)
- Russian Bill (1880, 1878, puis plus ou moins dans l’ordre chronologique)
- le révérend Aaron (1842, 1871, 1833, 1870 puis -enfin- dans l’ordre)

Au final, je n’ai pas pu m’attacher à un des personnages, et je suis déçue par ce livre.

Ludmilla - Chaville - 68 ans - 5 février 2019