Pnine
de Vladimir Nabokov

critiqué par Béatrice, le 19 février 2004
(Paris - - ans)


La note:  étoiles
Un portrait tout en tendresse
Pnine, émigré russe, enseigne dans une université américaine. Il est gauche et étourdi. Son anglais est médiocre et il ne comprend pas l’humour américain ; lorsqu’il déclare «dans deux-trois ans on me prendra aussi pour un Américain», l’audience éclate de rire. Il multiplie les maladresses. En revanche, il est capable de disserter sur les subtilités de la littérature russe, par exemple le temps spirituel et le temps physique dans « Anna Karenina ».

Ah, l’ironie tendre de Nabokov pour son personnage ! Désuet et en même temps fasciné par la modernité, Pnine est irrésistible. En contrepoint, les passages évoquant les souvenirs d’enfance et d’adolescence, intenses et fulgurants, donnent de l’épaisseur au personnage.
En toile de fond, deux communautés : les universitaires du campus et les émigrés russes. Le regard de l’auteur devient satirique. Les rivalités des professeurs ou la nostalgie des expatriés sont tournés en dérision.
Certes, ce roman n’a pas l’envergure de «Lolita» ; mais j’ai pris un grand plaisir à le lire.
Séduisant mais difficile 9 étoiles

Pnine est un éminent professeur qui nous vient de la lointaine Russie (voir son C.V. plus bas). Il enseigne le russe dans de hautes écoles d’Amérique du Nord. Outre qu’il a hérité d’un physique ingrat (comme on dit pudiquement), il accumule gaffe sur gaffe, est maladroit et ne parvient à parler correctement l’américain. Il est la risée de tous, tout en étant respecté et on lui pardonne ses bévues. L’histoire se déroule essentiellement au début des années ’50.
Voilà un roman qui n’est pas si facile que cela à lire : il faut être attentif, ne pas être dissipé (ce que je fus, hélas). Il faut dire que les phrases kilométriques de Nabokov n’arrangent pas les choses… A pointer la période où Pnine reçoit Victor, son fils « d’adoption » et les extraits que voici. A signaler enfin que ce roman est classé parmi les meilleurs de la littérature mondiale.

Extraits :

Son curriculum vitae. Né à Saint-Pétersbourg en 1898. Mort de ses père et mère, du typhus en 1917. Départ pour Kiev en 1918. Service auprès de l’Armée Blanche pendant cinq mois. (…) Echappé de la Crimée envahie par les Rouges, en 1919, pour arriver à Constantinople. Etudes universitaires finies. (…) Puis … En abrégé : a habité Paris à partir de 1925 et abandonné la France au début de la guerre d’Hitler. Est ici maintenant. Est citoyen américain, enseigne le russe et matières du même genre à Vandal College. (…)



- (l’arrivée à New York) Et pour finit, quand la grande statue surgit dans la brune matinale, à l’endroit même où, prêts à être incendiés par le soleil, ensorcelés et pâles, montaient les édifices semblables à ces rectangles mystérieux, de hauteurs inégales, qu’on voit sur les graphiques de pourcentages comparés (…)

- Victor fut heureux d’apprendre qu’ « écureuil « venait du mot grec signifiant « qui se fait de l’ombre avec sa queue «.

- Victor distinguait déjà ce que tant de grandes personnes n’apprennent jamais à voir : la couleur des ombres, la différence de teinte entre l’ombre d’une orange et celle d’une prune.

- Maintenant, ils étaient tous endormis. Pitié vraiment que personne ne pût voir le spectacle de la rue déserte, où la brise de l’aurore ridait la surface d’une grande flaque lumineuse, transformant les fils téléphoniques qui s’y reflétaient en lignes illisibles de zigzags noirs.

Catinus - Liège - 72 ans - 24 février 2014


un livre drôle et satirique 10 étoiles

La description des déboires d' un professeur d' université russe exilé aux Etats-Unis, de sa nostalgie gentiment moquée et une satire mordante des universités américaines des années 50.

Nevermoref - Issy les Moulineaux - 48 ans - 16 août 2013


Trop humain 9 étoiles

Chauve et bronzé, la cinquantaine naissante, le professeur Timofeï Pnine enseigne le russe à l’Université Waindell. Cela fait bien dix ans qu’il a foulé le sol de l’Amérique, et son anglais est encore imparfait. Pnine est invité à donner une conférence dans la ville d’à côté, mais il ne se rend pas compte qu’il s’est trompé de train. Pourtant Pnine n’a rien en commun avec le savant distrait, au contraire serait-il plutôt le type continûment sur ses gardes. Pour lui, « c’est le monde qui est distrait. » Certes, avec sa drôle de tête et son accent au couteau, Pnine peut nous paraître bien étrange. Mais de page en page, on s’attache à ce personnage singulier, le plus humain des personnages de roman.

Ravenbac - Reims - 58 ans - 25 mai 2013