Adios
de Kléber Haedens

critiqué par Vince92, le 17 mars 2017
(Zürich - 46 ans)


La note:  étoiles
La vie d’un dilettante
Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, Jérôme Dutoit est journaliste sportif, spécialiste du rugby. Pourtant, rien ne le prédisposait à suivre cette carrière : couvé et cornaqué par des parents sévères qui ne s’autorisent pas eux-mêmes la moindre incartade à la sacro-sainte routine, Jérôme trouve un échappatoire paradoxal lorsqu’il entre en pension. Au contact de ses camarades d’internat, il découvre le sport, les livres dont il avait été privé toute son enfance, et surtout les jeunes filles. La gent féminine constituera la grande passion de Jérôme Dutoit avec la gastronomie, la littérature et le rugby... c’est à ce voyage au cours de sa vie que l’auteur nous convie.
Je crois comprendre que le roman est largement autobiographique, Kléber Haedens l’ayant écrit en 1974, deux ans avant sa mort. Roman sur sa jeunesse, roman de sa vie avec des retours multiples sur les événements marquants de son existence et sur la fin la découverte de son véritable amour, Marie-Louise qui le laisse désespéré.
Kléber Haedens est indiscutablement un excellent prosateur, doté d’une plume classique, le lecteur prend beaucoup de plaisir à découvrir le style de cet écrivain, familier d’Antoine Blondin au point d’être parfois assimilé au célèbre groupe des Hussards, et très délaissé du public des lecteurs français. Sans doute paie-t-il sa proximité avec Maurras et son caractère d’anarchiste de droite. Caractère qui transparaît tout au long de ce roman... sa relation avec les femmes, son dilettantisme comme une réaction à son éducation austère font de Jérôme adolescent un personnage sympathique, auquel tout lecteur du sexe masculin peut s’assimiler : les premiers émois, l’incompréhension du sexe faible semblent être le lot de chaque garçon de quinze à vingt ans. Cependant, le dernier quart du livre est beaucoup moins intéressant, moins piquant : fréquentant désormais des personnages loufoques et originaux, Haedens s’abîme dans la contemplation de son nombril en déroulant pendant plusieurs dizaines de pages les séances de spiritismes et ses bons mots... dommage car le reste de l’ouvrage était très bon, drôle, intelligent, nostalgique et très bien écrit.
Il est toujours regrettable de quitter un livre sur une mauvaise impression... il ne faut pas oublier le reste cependant et Adios restera une lecture somme toute agréable.