Le bon gouvernement
de Pierre Rosanvallon

critiqué par Veneziano, le 25 septembre 2015
(Paris - 46 ans)


La note:  étoiles
Des mutations et bonnes pratiques en politique
Cet historien et politologue réputé commence cet essai par une longue démonstration selon laquelle les régimes démocratiques occidentaux ont tous adopté une présidentialisation, soit une personnalisation du pouvoir, un concentration autour d'un seul, chef d'Etat ou de gouvernement. La Constitution fédérale américaine est un modèle, l'évolution de la pratique française avec l'élection présidentielle au suffrage universel direct a conforté cette tendance, plus indirecte dans les régimes parlementaires classiques.
Cette conséquence est d'importance : les Parlements se sont effacés, leur influence a été émoussée, si bien que le débat, la collégialité, la délibération en ont été amoindris, ce qui n'a pas été pour améliorer le fonctionnement des institutions, les gouvernants s'étant éloignés des gouvernés, par une sorte de confiscation de fait.
A cela, il paraît nécessaire d'opposer un droit de savoir, de participation à la gestion. A ce stade de la démonstration, Pierre Rosanvallon mobilise les grands penseurs politiques pour asseoir son propos, depuis Jean Bodin au XVIème siècle, Rousseau, Necker, John Stuart Mill, notamment. Il insiste sur la lisibilité de la décision et souligne les excès d'une transparence mal pensée.
Il conclut sur les progrès en matière de contrôles, les Américains et Britanniques ayant été pionniers en la matière, les Français ayant décidé de combler le retard après l'affaire Cahuzac.
L'analyse du discours, la manière de considérer la langue de bois et le parler vrai, tour à tour, sont montrées en fin d'ouvrage, ce qui m'a semblé de grande valeur.

Ce livre est passionnant, limpide, donc accessible au grand public, ce qui est l'un de mes critères d'appréciation en général, et plus spécialement quand je présente des livres sur ce site. Il fait prendre du recul sur l'évolution du politique que nous sommes en train de vivre, l'histoire, la philosophie et la sociologie apportant chacune leur éclairage pour comprendre le phénomène en cause. Fort intéressant, il semble important, car il montre les manières de réappropriation de la compréhension de la décision et du débat politique. Je regrette juste que cet éminent auteur n'avance pas plus clairement des pistes de réforme. Mais son ouvrage me semble très important.