Tu récolteras la tempête
de Jean Hougron

critiqué par Tistou, le 7 septembre 2015
( - 67 ans)


La note:  étoiles
La nuit indochinoise (I)
Premier contact avec l’ensemble « La nuit indochinoise », de Jean Hougron. Le style est très plaisant, avec de belles envolées lyriques pour tenter de reconstituer cette nature qui l’a tant impressionné et des réflexions poussées sur les inter – relations coloniaux entre eux, coloniaux – indigènes, et inter – communautés. Il ne s’agit pas d’une trame statique ou contemplative. Nous découvrons Takvane, petit poste colonial entre Vientiane et Savannakhet situé dans une boucle du Mékong au Laos actuel, par les yeux de Georges Lastin, jeune docteur, médecin civil pour la population du village.
Takvane ; une soixante de « blancs », ainsi que les qualifie Jean Hougron, en fait les Français, rongés, bouffés par la dureté du climat, la vie délétère, l’opium, l’ennui.
Jean Hougron va nous dérouler les liens diffus qui relient des existences pour beaucoup vouées à l’échec, en tout cas confrontées à la difficulté, par de grands chapitres comme autant d’étapes initiatiques pour permettre au lecteur d’entrer dans ce monde finissant. Des morts, des drames, des analyses psychologiques toujours en appui, c’est une très belle lecture ; l’idéalisme de certains, le cynisme de beaucoup, la résignation progressive, les relations ambiguës de Georges Lastin avec sa compagne vietnamienne et de manière générale des Français avec les femmes indigènes, le mépris dans lequel sont tenus les métis, beaucoup de données sont abordées sans véritablement de tabous et on peut aisément imaginer pourquoi la publication de ce premier roman déplaira profondément aux autorités coloniales …
A la publication de « Tu récolteras la tempête », Jean Hougron fut successivement interdit de séjour au Laos puis au Vietnam. Il ne passera finalement qu’un peu plus de quatre ans en Indochine.
Et pour un Tistou qui a connu le Laos en 2014 – soit environ 65 ans après la rédaction de ce roman – il n’est pas difficile d’imaginer dans quelles difficultés se débattaient ces Français déracinés.