En enfer avec Dante
de Michael Meier

critiqué par Blue Boy, le 16 août 2015
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Bel emballage au contenu décevant
Comme dans l’œuvre dont cet ouvrage est inspiré, Dante et Virgile vont traverser les neuf cercles de l’Enfer. Le lecteur va être entraîné à travers des paysages fantomatiques peuplés de créatures infernales et de pénitents pour le moins inattendus. La question est de savoir qui des deux (les créatures ou les pénitents) seront davantage la cause des tourments des deux voyageurs…

Comme le diable, l’objet est d’un abord très séduisant. Format à l’italienne (la moindre des choses pour honorer Dante Alighieri), ruban marque-page, graphisme au minimalisme très contemporain et mise en couleur savamment étudiée dans des tons dominants noirs, rouge carmin et vert-bleu. Des arguments qui mettent en appétit pour découvrir ou redécouvrir la première partie de « La Divine Comédie », « l’Enfer ».

Pour cette adaptation, Michael Meier a respecté la trame du livre d’origine et repris les principaux protagonistes, tout en y intégrant des éléments actuels, qu’il s’agisse des personnages, des objets ou de la langue. Le tout sous le sceau d’une dérision bon enfant garantie sans blasphèmes ou alors si peu, en tout cas pas de quoi faire ciller un exorciste. Ainsi on croisera successivement Berlusconi (qui semble à l’aise en enfer comme chez lui), Chris de Burgh (sic), Adolf Hitler, Eddie la monstrueuse mascotte du groupe Iron Maiden, Aleister Crowley… La langue se veut châtiée et moderne (« chochotte », « ducon », « j’me casse », « têtes de bites »…) et on y fait référence à Internet, l’Iphone, Facebook et Twitter. Dans l’air du temps. Connecté, quoi. Qui plus est, les enfers sont frappés par la pollution et sont même encombrés de déchets nucléaires. De quoi nous rendre cet univers des plus familiers, à défaut d’être rassurant… Parce que oui, comme chacun sait, l’enfer, c’est les autres, et il existe déjà sur Terre…

Comme son personnage de Dante, Michael Meier a un look de hipster si l’on en croit la page d’introduction où il s’est lui-même représenté. Et comme tout hipster, Meier, qui collabore notamment avec les magazines GQ et Men’s Health, apporte un soin particulier à l’apparence. Et c’est bien cela qui caractérise cette production typiquement hype, qui souffre non seulement d’une absence de fond criante, mais également de clarté narrative, laissant le lecteur en pilotage automatique sans jamais se sentir réellement impliqué. Ce dernier ne pourra même pas se rattraper avec les gags, qui tombent la plupart du temps à plat, tout comme les dialogues, dont l’humour un rien confidentiel et branché peine à déclencher l’hilarité. Plus qu’une descente aux enfers (qui aurait été plus logique ici), c’est davantage à un bain dans les sables mouvants de l’ennui auquel on a droit. L’objet, au final très anecdotique, s'avère décevant par son contenu, c'est bien dommage.