Libérez l'emploi pour sauver les retraites
de Michel Godet

critiqué par Colen8, le 19 juin 2015
( - 82 ans)


La note:  étoiles
Privilèges des nantis, précarité des exclus
On l’oublie, un paramètre significatif du chômage est la démographie fluctuante de la population active. D’un côté, les marchés disparaissent par la concurrence, la compétitivité, les travailleurs détachés en France, les délocalisations, par l’évolution des technologies, celle des goûts ou des habitudes des consommateurs, en conséquence de quoi des usines ferment, des entreprises font faillite, des emplois sont détruits. Par ailleurs des métiers apparaissent, des entrepreneurs prennent des risques, gagnent des parts de marchés, des investisseurs soutiennent des projets innovants, les mesures de soutien aux entreprises telles que les baisses de charges aident à créer des emplois différents. Si le nombre d’actifs croit davantage que les départs en retraite, mécaniquement et même en période de croissance, le taux de chômage monte.
Depuis 40 ans la population active a augmenté de 5,5 millions pour seulement 3,5 millions d’emplois en plus. Pour la première fois en 2011 la population en âge de travailler a baissé, tendance appelée à durer jusqu’en 2035. Derrière l’annonce d’inversion de la courbe du chômage il n’y avait que l’anticipation d’une reprise simultanée de la croissance en Europe et de la diminution relative des entrées sur le marché du travail. Hypothèse trop optimiste comme le montrent les statistiques mensuelles depuis 2012.
Le leitmotiv de Michel Godet, toujours le même, reste que le travail c’est l’emploi, et pas l’inverse. Le travail crée la richesse qui crée ensuite l’emploi. Un chômage revenant à 5% comme chez nombre de nos partenaires de l’UE serait donc atteignable. La voie est indiquée par leurs bonnes pratiques ainsi que par les conclusions des innombrables rapports délivrés au sommet de l’Etat, hélas finissant le plus souvent au placard. Si même en France pendant la crise certains territoires ont maintenu un chômage inférieur à 6%, tout espoir n’est pas perdu.
Travailler plus ce serait allonger la durée de vie active. Autrement dit stopper la course aux bac+5 généralistes sans qualification, faciliter l’entrée des jeunes de 15-19 ans en apprentissage dans des filières où la demande est forte, apprendre de la réussite locale des territoires exemplaires animés par la volonté d’entreprendre. Libérer l’emploi c’est remettre à plat un code du travail inadapté, rendre plus fluides les relations sociales et bien d’autres propositions connues depuis longtemps. Hélas, nos dirigeants de ces décennies ont préféré creuser les déficits avec forces gesticulations et incantations. Les gouvernements successifs appuyés par ceux que Michel Godet nomme « la noblesse d’Etat », plus encline à se servir qu’à servir, ont considéré que l’indemnisation du chômage suffisait comme remède social, ignorant que trop généreuse et trop laxiste elle agissait comme un piège vis-à-vis des chômeurs et leur retour à l’emploi.