Un matin pour la vie: et autres musiques de scène
de Françoise Sagan

critiqué par Henri Cachia, le 24 mai 2015
(LILLE - 62 ans)


La note:  étoiles
Françoise Sagan est toujours là
Persuadé que Françoise Sagan était décédée au siècle dernier, quelle ne fût ma surprise de découvrir sur un rayonnage de la bibliothèque de ma ville, un recueil de nouvelles, inédit, « Un matin pour la vie et autres musiques de scène» publié chez Stock en 2011... De Françoise Sagan.
L'auteure à scandale de 1954 était-elle encore vivante ? Non bien sûr. J'appris qu'elle avait trouvé la mort en 2004 dans des circonstances mystérieuses pour certains, qui brillent à entretenir le flou.
Bonjour tristesse fut le premier livre à entrer dans ma famille prolétaire, et disons qu'il intriguait pour le moins, tout comme Brigitte Bardot au cinéma quelques années plus tard. Révélant le malaise d'une société bien pensante s'adonnant sans retenue au mirage de la consommation à tout crin, fortement encouragée (non sans intérêt) par le plan Marshall. Cet abcès explosant en 68. Eclaboussant la pensée bourgeoise.
Françoise Sagan, très vite ringardisée par les intellectuels de l'époque, est tombée dans l'oubli petit à petit. Il est vrai que nous avions soif de lectures plus manifestement révolutionnaires.

Quatre nouvelles inédites ouvrent ce recueil : « Menu » parue dans La Revue de Paris en 1955, « Un matin pour la vie » dans Elle en 1962, « Un vrai macho » dans Playboy en 1985, et « Histoire d'août » dans VSD.
Le triangle amoureux, bien connu des admirateurs de Françoise Sagan, règne en maître sur l'ensemble de ces textes. Bien qu'elle excelle dans ce genre, son style très novateur dans les années 50, finit tout de même, aujourd'hui, par lasser un peu.
Néanmoins « Souvenirs... Souvenirs... » vient comme un cheveu sur la soupe, au beau milieu de cet océan amoureux. Mais un cheveu bienvenu. Il nous trimbale dans une Land Rover et dans un safari pour tuer... Non pas des animaux très dangereux, mais les plus beaux et les plus fragiles. On se retrouve dans le fusil d'un ancien nazi renouant avec son instinct animal.
Là aussi, l'auteure sait nous tenir en haleine jusqu'à la fin. Dans les excès.

On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même. Aussi Françoise Sagan a écrit sa rubrique nécrologique dans le Dictionnaire des auteurs, publié sous la direction de Jérôme Garcin : « Fit son apparition en 1954 avec un mince roman, Bonjour tristesse, qui fit un scandale mondial. Sa disparition, après une vie et une œuvre également agréables et bâclées, ne fut un scandale que pour elle-même. »

Une bonne lecture, certes inégale, mais agréable.