Télégramme
de Putu Wijaya

critiqué par SpaceCadet, le 12 avril 2015
(Ici ou Là - - ans)


La note:  étoiles
Peut-t-on être libre et responsable tout à la fois?
A Jakarta, au début des années 1970, un journaliste goûtant une liberté aux portes de laquelle la réalité vient parfois frapper, est soudainement confronté aux responsabilités, et par conséquent aux choix, qu'il a jusqu'à ce jour tenté d'éluder. Face à cet ultimatum, porté par ses questionnements et autres remous intérieurs, il valse entre son quotidien et une démarche introspective nourrie de délires fiévreux, de scènes imaginaires ainsi que d'événements passés. Ce personnage et narrateur dont nous ne connaîtrons pas le nom, nous fait ainsi partager ses préoccupations, ses rêves, ses fuites en avant, ses peurs et ses contradictions.

Reconnu comme l'un des chefs de file de l'avant-garde littéraire indonésienne, Putu Wijaya, écrivain et dramaturge prolifique né à Bali en 1944, est particulièrement apprécié pour ce subtil mélange de réel et d'imaginaire au sein duquel se déroulent ses récits. Faisant fi des thèmes (récurrents en Asie du sud-est) du colonialisme, de l'occupation japonaise, des conflits sociaux, politiques et autres, il pose un regard neuf et singulier sur le monde qui l'entoure tandis qu'en phase avec son époque, il emprunte des modes d'expressions propres à traduire l'esprit du moment.

Rédigé sur un ton personnel et dans une prose simple (du moins c'est ce qu'il en ressort à la traduction), ça n'est pas tant pour son écriture qu'on apprécie ce roman mais surtout pour cette façon qu'a l'auteur de construire son récit en enchaînant les scènes de façon à nous entraîner dans un univers aux multiples possibilités, un univers au sein duquel il est difficile de faire la part entre le vrai et le faux, entre le réel et l'imaginé, entre la raison et la déraison.

S'il nous convie à une réflexion sur le thème de la liberté et de l'individualisme dans une société où l'engagement familial et communautaire prédominent, ce roman, novateur en son temps, offre un portrait réaliste d'une génération et d'un pays qui, entre tradition et modernisme, hésite à choisir sa voie.

Note: Ce compte-rendu fait référence à une version traduite en anglais du roman.