Les Derniers Jours d'un artiste
de Anwar Ridhwan

critiqué par SpaceCadet, le 8 mars 2015
(Ici ou Là - - ans)


La note:  étoiles
L'homme qui aimait les histoires
Jadis, il était des artistes, des poètes, que l'on appelait en langue malaise des 'penglipur lara'. Menant une existence d'itinérants, ils se déplaçaient de village en village, s'y arrêtant pour raconter des histoires à un public attentif. Ces conteurs, dont certains étaient également musiciens, étaient d'autant plus appréciés qu'ils constituaient bien souvent l'unique divertissement auquel les villageois avaient accès.

Pak Hassan, un homme rêveur et mal adapté aux réalités de la vie a choisi d'exercer ce métier. Très tôt, il quitte la maison familiale et parcours les routes de Malaisie, déclamant ses récits au long d'un incessant périple jusqu'au jour où, à un âge déjà avancé, il rencontre Selamah, celle qui deviendra sa compagne et lui donnera deux enfants. Intégrant éventuellement une existence sédentaire, Pak Hassan réalise au bout de deux décennies, qu'ayant épuisé son répertoire, il n'a plus rien de nouveau à raconter aux habitants du village où il s'est établi. Ce constat coïncide avec l'invasion japonaise ainsi que l'acquisition d'un récepteur radio par un des villageois. Le monde est en révolution et Pak Hassan sent sa vie sur le point de basculer.

Anwar Ridhman, s'inspire ici des traditions littéraires malaises pour concevoir un récit dont le style et la forme sont proches du conte, tandis qu'une narration menée tout en douceur, lui confère une qualité quasi hypnotique évoquant la tradition orale, sujet dont il est justement question dans ce récit. Il en résulte donc un roman dont la forme et à certains égards le contenu, fait miroir avec le sujet qu'il aborde.

On y découvre une histoire toute simple, habilement conçue et écrite dans une langue qui, en dépit de la traduction, conserve une tonalité à la fois douce et poétique. Les phrases s'enchaînent les unes aux autres et forment ainsi des petits espaces narratifs se succédant comme autant de soirées passées en compagnie de l'un de ces conteurs aguerris.

Outre sa conception particulièrement réussie, ce roman, tissé autour d'un thème à portée universelle, illustre comment nos inventions signent invariablement la fin de celles les ayant précédé et ont ainsi un impact considérable sur nos sociétés et nos existences.

Note: lu en traduction anglaise.