Le théâtre des opérations : Journal métaphysique et polémique 1999
de Maurice G. Dantec

critiqué par CCRIDER, le 12 janvier 2004
(OTHIS - 75 ans)


La note:  étoiles
Un bric à brac foisonnant
Cet énorme pavé (708 pages) est un fourre-tout , un bric à brac foisonnant et quelque peu grandiloquent d'un écrivain qui , après avoir publié trois titres dans la série noire s'est lancé dans ce fatras pseudo-philosophique quelquefois abscons et volontairement obscur . Le tout entrelardé de vers de mirliton vaguement surréalistes comme on pourrait en écrire à vingt ans en travaillant un peu du chapeau .Malgré tout , on se laisse aller à poursuivre sa lecture car , de ci , de là , on tombe sur des perles , des réflexions pertinentes , intelligentes , originales et ô merveille , non politiquement correctes . Une constante : Dantec est parfaitement conscient de la fin inéluctable de la civilisation occidentale vérolée par le positivisme , le matérialisme , l'hédonisme et l'incontournable connerie ambiante . Il sent confusément le manque de spiritualité de notre époque , son manque de morale , d'idéal , de courage et d'honneur . Rien que pour cela , il mérite d'être lu . Sans plus .
ainsi voilà la fin de la civilisation ? 3 étoiles

Un tel concentré de suffisance laisse pantois. Cet ouvrage m'aura tour à tour étonné, intrigué, irrité, jusqu'à atteindre un niveau rare d'exaspération sur la fin.
M Dantec livre ici une espèce de recueil de notes qui aurait pu donner naissance à ce qu'on aurait pu appeler un essai. Mais ce n'est pas tellement la forme bordélique que le message véhiculé et son absence d'argumentation qui m'emmerde. Même si ça part dans tout les sens, il me semble que l'idée maîtresse du livre est que Dantec considère que la civilisation est en gros arrivée à sa fin, au moment où elle s'autodétruit et où elle doit par décence s'autodétruire. Le pseudo développement de la civilisation a atteint sa quintessence vers la moitié du XXe siècle avec l'holocauste, la Bombe et les goulags, suites logiques des "avancées" de la "pensée" humaine, et non antithèses comme on s'efforce de le prétendre.
Ce qui est agaçant, ce n'est pas tellement le message : après tout je ne suis pas le dernier pour critiquer les "valeurs" véhiculées par la civilisation actuelle, mais plutôt le fait que ce journal-essai-ébauche a l'air d'un acte gratuit qui ne donne que très peu de pistes sur ce qu'il convient de faire (en supposant que Dantec estime qu'il y ait encore quelque chose à faire).
Que préconise-t-il donc ? D'oser appliquer les récentes découvertes scientifiques à la pensée humaine. Ca nous vaut un indigeste gloubi-boulga sur la physique quantique, les découvertes liées au cerveau humain, la génétique, avec vocabulaire à l'avenant ("saut quantique", "entropie", "saut disjonctif"...)
S'il y a quelque chose qui semble vraiment avoir disjonsté, c'est le cerveau de Dantec. Il avoue lui même avoir recours aux champignons hallucinogènes et aux susbstances psychotropes pour faciliter son travail, et c'est vrai qu'on en voit clairement les effets ici ! Petit bémol tout de même à ce sujet, le style qui ne se met même pas au diapason du délire ambiant mais reste finalement très "normal", même si on peut reconnaître qu'il a atteint ce dont il se réclame : l'efficacité tranchante de la lame.
Je me demande bien ce que les événements du 11 septembre lui ont inspiré sur la fin de la civilisation, mais je n'ai pas le courage d'affronter de nouvelles pages aussi gavantes. Le tome suivant restera sur les étagères du libraire.

B1p - - 50 ans - 3 février 2004