Notes Tome 9: Peu d'or et moult gueule
de Boulet

critiqué par Blue Boy, le 2 janvier 2015
(Saint-Denis - - ans)


La note:  étoiles
Irrésistiblement hilarant
Et voici paru le neuvième volume du dessinateur-blogueur Gilles Roussel, alias Boulet, avec une jolie couverture en impression couleur et or. Avec humour, l’auteur y évoque en vrac ses angoisses existentielles et métaphysiques de trentenaire régressif à l’approche de la quarantaine, mais aussi ses petits bonheurs, ses fantasmes et tracas divers, ses voyages et ses nouvelles expériences. Ce volume regroupe les pages parues sur son site entre juillet 2011 et juillet 2013.


Il m’aura donc fallu attendre le numéro 9 de ces « Notes » pour qu’enfin j’ai le bonheur de découvrir cet auteur. Ce mec a un talent fou, on a l’impression qu’il dessine comme il respire, que chez lui le dessin est plus qu’un art, tout simplement un langage à part entière comme l’écriture peut l’être pour les écrivains. Le bougre confie d’ailleurs ne pas recourir aux croquis. A croire qu’il pourrait tout dessiner, aussi à l’aise dans le dessin humoristique que dans l’aquarelle, se payant même le luxe de réaliser des estampes japonaises. Il suffit pour s’en rendre compte de consulter son blog bouletcorp.com. La plupart du temps en noir et blanc avec ponctuellement quelques touches de couleurs, ces « beaux dessins plein de petits traits », qui pourraient évoquer Crumb ou Moebius, impressionnent aussi par leur fluidité, leur sens du mouvement et du cadrage, mais surtout par leur folle expressivité dans la caricature, engendrant chez le lecteur une irrépressible envie de rire. Boulet étant le personnage principal de ses histoires, il fait preuve de beaucoup d’autodérision, peut-être un moyen de ne pas se choper le cigare, ce qui serait tentant lorsque comme lui on possède un tel talent.

Les sujets abordés vont du culinaire (les endives cuites, la « pizza-boulet ») à la physique quantique (plongeant notre héros dans des vertiges métaphysiques), en passant par le vol en apesanteur, une expérience ébouriffante vécue par sieur Boulet lui-même grâce à des commandes du CNES. Extrêmement hilarant, l’humour potache, au-delà de l’anecdotique, dissimule des thèmes plus sérieux comme le passage à l’âge adulte les enjeux de la réussite, où l’auteur sait faire ressortir les paradoxes et absurdités de notre monde tellement bien organisé.

Sa façon est telle de ne pas se prendre au sérieux qu’il parvient à nouer une complicité immédiate avec le lecteur. Déjà suffisamment torturé, Boulet s’accroche à son âme de gosse, on ne saurait le blâmer, mais ne lui dites pas que « les dessinateurs sont de grands enfants ». Ça a le don de le mettre hors de lui, du coup il a les arguments pour assassiner une fois pour toutes ce cliché idiot, comme il le fait dans les premières pages. Boulet est un auteur aussi talentueux qu’attachant, et ce seul tome m’aura suffi pour être définitivement conquis. Je vais de ce pas me mettre en quête des huit précédents…