Hommes, bêtes et démons
de Qian Zhong shu

critiqué par Jfp, le 21 décembre 2014
(La Selle en Hermoy (Loiret) - 75 ans)


La note:  étoiles
le dernier lettré
Quatre nouvelles, datant de 1944, par un écrivain chinois renommé ayant parcouru au cours de sa longue carrière la quasi-totalité du vingtième siècle. À cheval entre tradition et modernité, elles allient une profonde érudition, celle d’un des derniers lettrés de l’Empire du Milieu, à une vision désabusée de l’occidentalisation de la Chine, quelques années avant le "coup de balai" de la dictature maoïste. Bardées de notes expliquant les nombreuses allusions au bagage culturel chinois (jeux de mots, proverbes, citations diverses), excellemment traduites, les nouvelles de Qian Zhongshu raviront le lecteur par leur légèreté et leur acuité, qu’il s’agisse des rapports entre hommes et femmes ("Le rêve de Dieu", "Pensée fidèle"), du temps qui passe ("La chatte"), ou bien encore de la notoriété ("Inspiration"). Et comme il se doit, le surnaturel est au rendez-vous. J’ai particulièrement apprécié "Le rêve de Dieu", qui ouvre ce recueil. Le récit joue avec toutes les ficelles du raisonnement, en le poussant jusqu’à l’absurde, mais un absurde jubilatoire, tout empreint de poésie. Même si cela doit faire se retourner dans sa tombe cet honorable écrivain, la tournure de cette nouvelle rappellera étrangement aux amateurs de science-fiction ce que l’on appelle "heroic fantasy". Un délice…