Le libraire du Rialto
de Marie De Bei

critiqué par ROMARIN93, le 11 novembre 2014
( - 69 ans)


La note:  étoiles
De L'âme de Venise ...ou le "libraire du rialto"
J'ai lu avec plaisir un livre qui vient de paraitre chez l'Harmattan, "le Libraire du Rialto". L'histoire est pathétique à souhait- un enfant pauvre dans l'Italie d'après- guerre est obligé d'aller travailler à dix ans- Avec une trame pareille, on pouvait craindre un récit larmoyant.

Ecrire une biographie, c'est une facilité pour un romancier.
C'est Emmanuel Carrère qui le dit dans son dernier livre: Le Royaume et lui, des biographies, il en a écrites.

Et pourtant l'auteur se sort plutôt bien de ce piège. Comment ? D'abord par son style qui sait être à la fois sobre, poétique et réaliste dans les dialogues. J'ai songé en lisant à ce que dit Appelfeld je ne sais plus dans quel livre: "Seuls des mots justes construisent un texte littéraire et non le sujet". Ensuite, par le décor qu'elle plante: Venise mais pas Venise des clichés historiques, une Venise plus charnelle celle du peuple, enfin par la construction de scènes fortes d'une grande intensité dramatique. Les personnages secondaires ne manquent pas non plus de vérité.

Même s'il y a des reflets de lumière sur les marbres des palais, des ponts, des gondoles bref tout le falbala habituel, - à petites doses, il est vrai- il y a aussi une foule de détails sur Venise à travers ces 50 dernières années en vrac j'ai retenu: les campaniles privés de leur cloche, les vaches de Santa- Marta, les manifestations des femmes sur le Rialto etc… Il y a aussi des dialogues d'une grande vérité truffés de termes italiens et puis ce personnage principal, ce petit garçon surnommé le "maggiolino", très attachant, élevé dans la rue qui n'attend rien des adultes et tout de la ville elle-même. Il y a des personnages secondaires pas négligés du tout: la mère par exemple qui n'est pas qu'une "mama" italienne mais aussi une femme aux contradictions si vivantes.

Et c'est écrit dans une langue fluide qui ménage de belles surprises.

La narration classique (trop?, l'auteur n'a pas pris beaucoup de risques à ce niveau-là) nous offre un récit linéaire mais avec une belle surprise finale ( que je ne vous dirai pas. )

Je conseille ce roman à découvrir. En plus dans ces temps où les livres sont en péril, c'est un chant à leur gloire.