Le bâtard de Erskine Caldwell

Le bâtard de Erskine Caldwell
(The bastard)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Myrco, le 14 novembre 2014 (village de l'Orne, Inscrite le 11 juin 2011, 74 ans)
La note : 4 étoiles
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"Noir, c'est noir..."

"Le Bâtard, c'est tout simplement l'exercice littéraire d'un débutant inspiré par ses errances et ses observations dans une région qui lui est familière entre Baltimore et Philadelphie". Ainsi Caldwell parle-t-il de son premier roman (court-130 pages) paru en 1929, qui s'inscrit dans la veine la plus pure du roman noir américain.

Pour ses débuts de romancier (il n'avait jusque-là publié que des nouvelles), Caldwell n'avait pas lésiné sur le sordide.
Le roman commence sur un meurtre, simplement parce que le personnage central, Gene Morgan, né d'une prostituée dénuée de tout sentiment maternel et de tout sens moral, qui aurait tué l'enfant pour s'en débarrasser si on ne lui avait enlevé, n'a pu supporter l'image de cette mère indigne, que lui renvoyait sa future victime. Des meurtres aussi impulsifs, il y en aura d'autres... car dans cet univers , la vie ne vaut pas cher.
Le parcours de Morgan, en quête de petits boulots, de retour dans la petite ville de son enfance, va nous entraîner, au gré de ses rencontres, dans un monde de dépravation où sexe, violence, beuveries, drogue composent le quotidien d'êtres livrés à leurs plus bas instincts et ce, dans l'innocence de leur totale absence de conscience morale: voir la scène de la scierie, summum de cruauté et de sadisme puéril dans laquelle un "nègre" ne suscite pas plus de compassion qu'un ver de terre. Ici, les femmes n'échappent pas à cette vision d'une humanité animale et ne sont, à quelques exceptions près, que des femelles en chaleur.
Et lorsqu'aux deux tiers du récit, celui-ci bascule -sans transition et de manière improbable- Morgan tombant amoureux de la jeune Myra, parce que celle-ci, justement, est "propre", l'embellie ne sera que de courte durée...

L'auteur ne juge pas, à aucun moment; il donne à voir. Mais j'ai peine à imaginer que cela puisse être le reflet réaliste de l'état d'incivilisation de ce sud des Etats-Unis de l'époque qu'il dénoncera par ailleurs.
Si je ne suis jamais parvenue à entrer dans cette histoire, je le dois probablement moins à un rejet du sordide qu'à celui de ce que j'ai perçu comme une surenchère permanente, cassant la crédibilité jusqu'à friser parfois le grotesque (citons par exemple le double viol de la fugueuse que l'on vole en plus! ou la nature de la monstruosité du bébé).

Toutefois, si la construction s'avère plutôt chaotique et déséquilibrée (notamment en ce qui concerne les enchaînements d'un moment de vie à un autre) et l'œuvre non aboutie, par contre les dialogues, triviaux, respirent l'authenticité et la plume sait étonnamment demeurer dans l'ellipse dans l'évocation des scènes de sexe.

Une vision dérangeante... curieusement moderne par son absence de références à toute notion de bien et de mal.

Au final, une curiosité si l'on s'intéresse de près à l'œuvre d'Erskine Caldwell et/ou au roman noir américain...

A noter une postface qui décortique l'œuvre de manière intéressante.

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