Comme si nous étions déjà libres
de David Graeber

critiqué par Henri Cachia, le 26 novembre 2018
(LILLE - 62 ans)


La note:  étoiles
L'horreur des jobs à la con...
L'horreur des jobs à la con...

« La servilité des élites politiques actuelles en font les laquais des plus riches et des plus puissants, de sorte que les mécanismes de nos systèmes dits démocratiques ne réussissent pas à résoudre ni même à endiguer les crises dans lesquelles nous enfonce le capitalisme. » (début de la quatrième de couverture).

Des emplois, oui, mais pas n'importe lesquels ! Les limites du capitalisme serait-il dans ce qu'il n'est plus capable que de produire « des boulots à la con », expression propre à l'auteur.
Invité de Laure Adler, en septembre dernier, David Graeber apporte une parole rafraîchissante, et signale dans ses livres, notamment : « Dette:5000 ans d'histoire », peut-être le plus connu, comment s'organiser pour parvenir à une démocratie directe.
Mais c'est pas simple, c'est du boulot !
Râler c'est bien, s'organiser c'est mieux ! Tout au long de ce livre, l'auteur nous raconte son expérience pratique du mouvement OWS Occupy Wall Street, tout en faisant référence à de nombreux autres auteurs, qui à chaque fois qu'il les citent ne manque jamais d'en donner des références très précises.
Voyages au travers des siècles, des pays, des tribus, des pirates, autant d' origines et d'expériences de démocraties directes.



... « … La richesse engendre le pouvoir, ce qui engendre encore plus de richesse. Pendant la crise dite des sociétés d'épargne et de crédit, dans les années 1980 – un scandale dont les proportions semblent aujourd'hui presque désuètes – un comité du Congrès a demandé au banquier Charles Keating si le 1,5 million de dollars qu'il avait distribués à une poignée d'élus pouvait lui acheter de l'influence. « Mais bien entendu ! » avait-il répondu... Aujourd'hui, le personnel et le politique sont en parfaite adéquation. Presque tous les sénateurs américains et la plupart des représentants de la Chambre font partie de ces 1% lorsqu'ils entrent en fonction, ils sont maintenus en poste grâce à l'argent du 1% et ils savent que s'ils rendent service au 1%, ils seront bien récompensés par ce 1% à la fin de leur mandat.*1. ... »...(Joseph E. Stiglitz, « Of the 1%, by the 1%, for the 1% », Vanity Fair, mai 2011.)

... « … Quand des guérillas s'attaquaient à des postes de police et dynamitaient des trains, Ghandi répétait que s'il préconisait l'approche non violente, ces gens étaient honnêtes et essayaient simplement de faire ce qu'ils croyaient être juste. Il insistait pour dire, que s'il était moralement supérieur de s'opposer à l'injustice de façon non violente plutôt que par la violence, il était moralement supérieur de s'opposer à l'injustice par la violence que de ne pas s'y opposer du tout. Pour Ghandi le pire crime était la passivité. Et face à l'injustice flagrante, il écrivait que s'il était forcé de choisir entre la violence et la lâcheté, il recommanderait la violence... »... (Norman Filkenstein, What Ghandi Says : About Nonviolence, Resistance and Courage, New York, O/R Books 2012

... « … Le fait que le leadership puisse découler du consentement de ceux qui sont dirigés plutôt que d'une autorité supérieure semblerait avoir constitué la réalité des équipages de bateaux pirates aux début du Nouveau Monde outre-Atlantique. Non seulement les pirates élisaient leurs capitaines, ils savaient aussi comment en limiter les pouvoirs (par l'entremise de quartiers-maîtres et de conseils de navires) et connaissaient les relations contractuelles entre l'individu et la collectivité (sous forme d'actes d'un navire, précisant le partage du butin et les taux compensatoires pour les blessures au travail)... John Markoff, « Where and When Was Democraty Invented ? », Comparative Studies in Sociaty and History, n° 41, 1999, p. 673.

Très intéressant à lire, par les temps qui courent...