Au champ de Mars
de Pierre-Michel Tremblay

critiqué par Libris québécis, le 2 août 2014
(Montréal - 82 ans)


La note:  étoiles
Il faut être un winner
Cette pièce de théâtre Au champ de mars de Pierre-Michel Tremblay s’intéresse au stress post-traumatique d’un Québécois revenu de l’Afghanistan moralement défait.

Éric Lebel consulte une psy afin de se libérer du mal qui le gruge. La psychothérapie piétine parce que le patient s’abstient de parler de son vécu en Afghanistan. Comment soigner un abcès si l’on refuse que l’on en extirpe le germe responsable? Mais, par un heureux concours de circonstances, cet ex-soldat trouve sur son chemin un réalisateur à succès désireux de tourner un film sur son aventure afghane.

Pour éviter la démonstration classique du mal du belligérant déçu, le dramaturge confie à ce réalisateur la tâche de tourner une œuvre sur le sujet. Ce dernier raconte à son personnage ressource comment il l’envisage, soit en plongeant en autres dans le passé de son héros dans une ville de mines à ciel ouvert, entraînant ainsi le mariage douloureux d’un état d’âme à une géographie apocalyptique. Le symbole est fort et bien amené.

La trame recouvre les relations d’Éric. L’échec attend tous les rapports du héros, faute de s’ouvrir sur la source de son mal. Son silence menace sa réintégration à la vie civile, déjà mise à l’épreuve pendant sa jeunesse par la désaffection des mines, principales sources d’emplois de la région. Comment être heureux quant tout concourt à son malheur ? Et l’armée n’est pas un viatique, loin de là. En fait, Éric se considère comme un looser. Jeune, il habitait une ville périclitante. Adulte, il a combattu un ennemi invincible. Ces faits découragent tout jeune homme en quête de sa valeur.

Le dramaturge s’est appliqué à illustrer ce désir de valorisation qui se butte à des culs-de-sac, où attendent les psys pour aider les âmes incapables de démêler le vrai du faux. Et il a surtout réussi à pénétrer de façon touchante l'âme d'un soldat marqué par la guerre, Magnifique !