L'Homme de l'année, tome 7 - 1894 L'Homme à l'origine de l'affaire Dreyfus de Fred Duval (Scénario), Florent Calvez (Dessin)

L'Homme de l'année, tome 7 - 1894 L'Homme à l'origine de l'affaire Dreyfus de Fred Duval (Scénario), Florent Calvez (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Aventures, policiers et thrillers , Bande dessinée => Légende, contes et histoire

Critiqué par JulesRomans, le 6 septembre 2014 (Nantes, Inscrit le 29 juillet 2012, 65 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 187ème position).
Visites : 4 450 

Pas besoin d’ajouter une dose de fiction pour une vie si agitée

Dans cette série jusqu’à présent les scénaristes faisaient preuve parfois d’une grande imagination qui arrivait à bien s’intégrer dans le contexte. Ainsi autant le roman historique pour les jeunes "Il s’appelait … le soldat inconnu" a recours à des actions bien tortueuses et invraisemblables pour nous faire connaître la prétendue véritable identité du soldat inconnu, autant le dans celle série "L’homme de l’année", le tome "1917, le soldat inconnu" le scénariste proposait des pistes malicieuses tant pour la substitution que pour la personnalité de l’homme en question.

Avec ce tome autour de l’année 1894, l’Affaire de Panama et l’Affaire Dreyfus proches l'une de l'autre sont évoquées. Plus que de suivre en la mettant fort adroitement en scène l’Histoire pour cette période, le scénariste met en lumière un personnage que l’on oublie bien de citer et qui eût un rôle non négligeable dans la vocation d’espion d’Esterházy, l’homme de l’année 1894.

Il s’agit de Jules Roche, successivement député du Var, de la Savoie et de l’Ardèche. Il passe de la gauche radicale laïque aux républicains modérés opposés à la loi de 1905, et les dessins de ce personnage, en habit folklorique des trois départements qu’il a représentés, sont là pour rappeler ses retournements de veste. Le scénariste maîtrise parfaitement les origines de l’Affaire Dreyfus et il réinvestit habilement ses travaux anciens sur les caricatures de l'époque qui en traitent.

Jamais, sans aucune tonalité didactique, une BD n'est arrivée à faire saisir les tenants et les aboutissements d'un des divers scandales qui ont agité nos divers régimes. De l’Affaire Dreyfus, même les enseignants d’histoire apprendront des choses et presque tous les lecteurs de cette BD en sauront beaucoup plus autour de l’antisémitisme en France, faisant des découvertes comme avec le fait que le dernier pogrom en France se produit en 1848 dans le Haut-Rhin (à Durmenach dans le Sundgau, voir http://judaisme.sdv.fr/synagog/hautrhin/…).

Visages et couleurs sont dans le sombre, vu la gravité du propos, même si des touches d’humour dans les vignettes ne sont pas exclues comme lorsque l’on voit avec leur couvre-chef militaire dans le même lit les attachés militaires allemand et italien qui résident à Paris. Le scénario étant centré sur Esterházy et non sur Dreyfus, qu’on ne cherche pas ici les figures de Zola, Jaurès ou de Clemenceau.

Bref pour les dernières critiques en matière de BD historiques que nous réalisons ici, nous sommes très heureux de pouvoir porter un contenu d’une telle puissance. Une sorte de trèfle à quatre feuilles qui console des propos des exaltés de la Saint-Patrick.

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10 étoiles

Critique de Shelton (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 67 ans) - 11 septembre 2014

La bande dessinée s’empare, au fur et à mesure, de tous les thèmes, de tous les genres, de toutes les aventures humaines, comme avant elle l’a fait la littérature. C’est un fait et je trouve cela plutôt bien. C’est une chance et même une sorte de preuve de la maturité prise par ce mode narratif complexe et hybride que certains continuent – mais pour encore combien de temps – à sous-estimer ou même mépriser… Avec la collection-concept L’homme de l’année, les éditions Delcourt proposent aux lecteurs de parcourir l’histoire de façon originale, en compagnie d’un homme, connu ou inconnu, reconnu par l’humanité pour ses qualités ou ses défauts, acteur direct ou indirect, d’un évènement parfaitement identifié. A chaque fois, un seul album écrit et dessiné par un duo d’auteurs. Jusqu’à maintenant, c’est une collection parfaitement réussie et le dernier sort, 1894, l’homme à l’origine de l’affaire Dreyfus est au tempo des précédents. On retrouve au scénario Fred Duval (Hauteville House, Jour J, Carmen Mc Callum…) et au dessin Florent Calvez (Les aventures extraordinaires de Nelson Lobster…).

L’affaire Dreyfus est tellement connue que depuis longtemps on ne la nomme plus que l’Affaire ! Mais comme elle a maintenant plus de cent ans, il faut bien avouer que pour le grand public, le plus jeune public en particulier, elle n’a plus beaucoup de sens. Qui est Dreyfus ? Pourquoi fut-il condamné ? Quelle peine a-t-il réellement subi ? Fut-il gracié, rejugé, réhabilité… Tout cela est si lointain que l’Affaire en devient confuse. D’ailleurs, pour beaucoup Dreyfus est innocent ! Mais de quelle faute parlons-nous et, surtout, qui est le coupable ? Je trouve salutaire d’avoir choisi cet évènement majeur de notre vie politique française pour sujet d’une bande dessinée. Il se pourrait bien que ce soit salutaire, à condition de la faire lire à ceux qui ignorent tout de cette affaire, de cette période, de cet avant-guerre de 14-18…

On sent que le scénariste, Fred Duval s’est parfaitement renseigné et documenté sur cette affaire Dreyfus et le parti-pris de suivre Esterházy du début des évènements, jusqu’à sa mort, rend l’ensemble parfaitement compréhensible même si on n’est pas spécialiste de Dreyfus. La pertinence est totale, le scénario très bien construit pour que cet album reste bien aussi une histoire de bande dessinée, et, enfin, l’équilibre entre texte et dessin me semble satisfaisant pour une bande dessinée qui doit quand même nous apprendre beaucoup…

Ayant beaucoup lu et travaillé l’affaire Dreyfus dans le cadre de mes cours d’Histoire des médias, j’ai retrouvé là l’essentiel, et même plus. Du coup, j’ai décidé d’intégrer cette bande dessinée dans les lectures conseillées à mes étudiants cette année.

La narration graphique, tout en étant résolument classique, historique et solide, penche parfois dans le symbolique et ce n’est pas pour me déplaire. Il est bon de ne pas enfermer le lecteur dans une histoire trop réaliste ce qui pourrait avoir comme effet d’endormir certains lecteurs. Là, ce n’est vraiment pas le cas !

Vous l’avez donc bien compris, j’ai beaucoup aimé cette bande dessinée tant par son fondement historique, que par son angle d’attaque de la narration, que par son aspect prévention de l’antisémitisme et fascisme, que par son graphisme de qualité, son impression générale et, surtout, parce qu’elle m’a enchanté durant toute la lecture…

Une bande dessinée qu’il faudrait faire lire à partir de 15 ans, qui devrait être dans tous les lycées, dans toutes les familles !

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