Aimé Césaire, un volcan nommé poésie
de Bruno Doucey, Christian Epanya (Dessin)

critiqué par JulesRomans, le 14 septembre 2014
(Nantes - 65 ans)


La note:  étoiles
Quoi de neuf ? Césaire le bien Aimé
"Sur la route de la trace avec Aime Césaire" sort de façon autonome mais aussi dans un coffret qui regroupe ce titre avec "Léopold Sédar Senghor : le poète des paroles qui durent" et "Léon-Gontran Damas, le poète jazzy", deux ouvrages dont nous avions déjà parlés ici.

Le parti pris d’une illustration très réaliste (proche de celle que l’on pourrait voir dans une BD historique, les bulles en moins bien sûr) est bien adapté pour un homme qui s’attacha à vouloir modifier les conditions socio-économiques et dont l’île d’origine est fortement marquée par le passé esclavagiste. L’illustration de Christian Epanaya reprend d’ailleurs une scène que l’on dirait tirée d’un livre documentaire pour la jeunesse où un acheteur d’esclave vérifie la dentition d’un négrillon avant de décider de l’acheter. L’anecdote sur le livre d’histoire en usage dans les écoles des Antilles françaises où on évoque « nos ancêtres les Gaulois » parlera bien au jeune lecteur et Christian Epanaya l’a traitée avec économie, sans forcer le trait, puisque l’on ne voit que les mains (et non le visage) de Césaire ouvrant un livre où une pleine page est offerte à la représentation d’un chef celte.

Comme d’habitude de courts chapitres, bien centrés sur un thème précis, composent les ouvrages de cette collection : Une enfance sous les tropiques, Bonjour monsieur Schoelcher, Un Martiniquais à Paris, Un Martiniquais à Paris, Un cahier page à page, Le cheval fou de la poésie, Les visiteurs du soir. Le récit de la vie se termine, juste avant l’annonce de son décès en 2008, avec le rappel qu’Aimé Césaire, ayant quitté ses fonctions publiques, refusa de recevoir Nicolas Sarkozy alors à la Martinique en tant que ministre de l’Intérieur. Comme à l’habitude une page de repères chronologiques autour de la vie du personnage est toute à la fin du livre.

On notera que du fait de certains écrits d’Aimé Césaire, la personnalité de l’haïtien Toussaint Louverture est assez développée. Par ailleurs à la page 13 il est fort intéressant de souligner que le grand-père du personnage partit pour l’École normale de Saint-Cloud, ceci permet de comprendre que la perspective d’intégrer l’École normale supérieure de la rue d’Ulm habita très tôt Aimé Césaire.

Il faut savoir que l’École normale de Saint-Cloud formait jusqu’en 1940 des professeurs d’école primaire supérieure (niveau collège), des professeurs d’école normale et des inspecteurs de l’enseignement primaire. D’après les renseignements que j’ai glanés, il apparaît que le grand-père a bien été sur les bancs de l’École normale de Saint-Cloud et qu’à sa sortie Ferdinand Césaire fut brièvement (il décède en 1896 à trente-huit ans) professeur de français au lycée de Saint-Pierre (qui fut détruit par l’irruption volcanique bien connue), ce qui suppose qu’il passa une licence de littérature française durant son séjour à Paris (examen qui n’était pas au programme de Saint-Cloud). Bref si Bruno Doucey n’a pas tort en le donnant instituteur, il est bon de préciser qu’il fut également professeur. La Martinique a d’ailleurs une École normale départementale depuis 1870, elle devance ainsi la moitié des départements métropolitains en la matière. On aura la généalogie ascendante d’Aimé Césaire ici http://www.patrimoines-martinique.org/?id=155

"Sur la route de la trace avec Aimé Césaire" sort de façon concomitante, il s’agit d’un ouvrage présentant les réflexions qui permettent de pointer l’évolution de la pensée du personnage. Destiné à des adultes, il est composé essentiellement de textes d’Aimé Césaire. "Sur la route de la trace avec Aime Césaire" constitue donc un prolongement à "Aime Césaire : un volcan nommé poésie" (qui est plutôt destiné à ceux qui collégiens, lycéens ou majeurs ne connaissent pas vraiment l'auteur). Par ailleurs nous avions déjà chroniqué sur Critiques libres "Aimé Césaire, le nègre indélébile" d'Yves Pinguilly.