Pages de gloire
de Patrick Bousquet, Hector (Dessin)

critiqué par JulesRomans, le 16 août 2014
(Nantes - 65 ans)


La note:  étoiles
En passant par la Lorraine avec mes sabots (bis), rencontrais la tranchée des baïonnettes, avec mes sabots mignonette, oh, oh, oh ! avec mes sabots !
"Pages de gloire" est un des titres de la maison Offenstadt durant la Grande Guerre, ce groupe de presse est spécialisée dans le lectorat pour enfants mais avec "Pages de gloire" il s’adresse aux adultes civils. La famille est d’origine juive bavaroise et face à de nouvelles critiques autour de sa nationalité française (certaine mais en fait obtenue par naturalisation), les éditeurs de "L’Épatant" (où paraissent les aventures des Pieds-Nickelés) et du journal "Fillette" lancent en décembre 1914 un hebdomadaire destiné à informer (mais dans bien des cas désinformer en suivant la ligne du bourrage de crâne) sur le conflit en cours.

Patrick Bousquet, qui est aussi scénariste de BD, connaît-il ce périodique "Pages de gloire" ? Il ne nous en parle pas dans sa préface où il nous parle de l’origine de son très lointain intérêt pour la Première guerre mondiale. Dans son ouvrage "Pages de gloire" il propose des textes très courts (un volume total de deux à quatre pages avec des caractères assez gros) largement illustrées en noir et blanc sur des parties de pages, voire des pages entières par Hector. Le style du dessin est réaliste avec une bonne expressivité pour les personnages.

Les thèmes traités dans un langage clair et en faisant une place non négligeable aux dialogues reconstituent des épisodes de la Grande Guerre qui devraient souvent intéresser les jeunes par leur aspect assez insolite. Ce sont dans l’ordre : les taxis de la Marne, Vaillant le pigeon de tous les espoirs, la Voie sacrée, Prince le chien sanitaire, Madelon, des héroïnes parmi tant d’autres, la tranchée des baïonnettes, Charles Nungesser piège mortel, la mort n’a pas de couleur (sur les tirailleurs sénégalais), les gueules cassées, l’ossuaire de Douaumont, le choix du soldat inconnu, Grande guerre et littérature.

Deux choses m’ont gêné, la première est que l’auteur mêle médiation (fort réussie d’ailleurs) de faits historiques et fictions (même s’il s’agit de rendre l’esprit de l’époque, avec par exemple le travail des femmes). La seconde est qu’il arrive avec ses gros sabots lorrains pour nous faire passer pour une possible vérité historique la légende vendéenne de la tranchée des baïonnettes. Celle-ci rapportait que devant Verdun des soldats vendéens étaient morts soufflés par un obus et enterrés debout dans la tranchée avec leur fusil le long du corps. De plus mal informé l’auteur nous rajoute une couche de Bretons dans le 137e RI, or ce dernier basé dans l’extrême sud du département de Vendée, ne comptait pas plus de Bretons que dans les autres régiments non armoricains. Raconter cette légende a toute sa place, encore faut-il la présenter comme ce qu’elle est et éventuellement expliquer pourquoi il est très intéressant qu’elle trouve son origine en Vendée.

Il est à noter que l'histoire de Vaillant le pigeon de tous les espoirs qui raconte le voyage authentique du dernier volatile à quitter le fort de Vaux avant que les Allemands ne s'en emparent en juin 1916, est plus développée dans "Une mission pour Vaillant". Cet ouvrage, également pour la jeunesse, a l'avantage sur le précédent (pour la vérité historique et la sensibilité des jeunes lecteurs) de dire que certes le pigeon arriva mourant au colombier mais qu'il vécut encore quelques années, alors que "Pages de gloire" laisse entendre qu'il meurt après avoir livré son message.

L'auteur Patrick Bousquet propose aussi les aventures d'un chien sur les lieux de combat durant la Première Guerre mondiale, avec la série "Bleu" toujours aux éditions Serpenoise.