Un privé à bas bilan de Eric Dejaeger

Un privé à bas bilan de Eric Dejaeger

Catégorie(s) : Littérature => Policiers et thrillers , Littérature => Francophone

Critiqué par Débézed, le 15 juin 2014 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 8 étoiles
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"Couilles du diable"

J’avais à peine lu une trentaine de lignes de ce livre que j’avais l’impression d’avoir descendu un bon nombre d’étages de ma déjà longue existence et de me retrouver à l’âge où on lit des polars en cachette. Il me semblait que je dévorais un texte enfant bâtard d’un vieux San Antonio et d’une œuvre d’un hôte de la fameuse collection « Fleuve noir » : Mc Bain, Chase ou un autre, je ne sais… En effet Eric Dejaeger, le polyvalent des lettres belges, auteur aux talents multiples, éditeur d’une revue littéraire, blogueur, a commis un polar inspiré par des auteurs qui ne venaient pas des pays nordiques et qui n’avaient pas encore pris l’habitude d’écrire des pavés formatés pas toujours très digestes. Un polar comme ceux que je dévorais à la fin de mon adolescence avant que le genre me sature et que les nouveaux auteurs me détournent définitivement de ces lectures. Ce polar c’est aussi une parodie qui met en scène un détective de fortune, ou d’infortune, marginal, anarchiste sur les bords, il refuse toutes le contraintes administratives ou autres, mais il a quelques principes tout de même : on ne s’attaque pas aux faibles, on ne gâche pas, et si on baise n’importe comment, n’importe où, on ne baise qu’avec des gens consentants. « Nous vivons dans une société dégueulasse où il y a plus que le fric qui compte. Le fric qui donne le pouvoir… J’ai toujours détesté le fric et le pouvoir ».

Frédo, un vieux jeune presque trentenaire, toujours à la charge de ses parents, traîne ses savates de bistro en bistro en évitant de s’engager dans un quelconque boulot. Mais un jour dame chance lui fait un clin d’œil en forme de gain substantiel à la loterie et, la pression de son père aidant, il décide alors de prendre son indépendance en gagnant sa vie sans taper ses parents. Il part pour Bruxelles où il installe, avec quelques bouts de ficelle, quelques matériels de récupération, beaucoup de débrouillardise et peu de scrupules, une agence de détective privé qui trouve rapidement ces deux premiers clients : l’éternelle bourgeoise trompée et l’inévitable papa inquiet de ne plus voir sa fille adorée. Frédo engage l’enquête avec tout le sérieux dont il est capable et l’appui d’une nymphomane fortunée et du petit ami de la belle disparue. Et l’aventure commence, pleine de rebondissements et de suspens…

A travers cette enquête Eric dénonce tous les truismes et lieux communs qu’on rencontre dans tous les romans policiers actuels tout en se moquant de tous les auteurs qui usent et abusent d’anglicismes pour masquer leurs lacunes en français. Il nous démontre aussi qu’avec des personnages banals, communs, pas franchement séducteurs, mal équipés, peu versés dans les technologies sophistiquées, disposant d’une puissance de feu très limitée, on peut tout de même construire une intrique haletante qui tient le lecteur en haleine jusqu’au dénouement qui n’était pas facile à envisager. « Couilles du diable », il est encore possible d’écrire de bons romans policiers sans sombrer dans les chausse-trappes d’un conformisme trop convenu.

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