Histoire secrète des Mongols, chronique mongole du XIIIe siècle
de Marie-Dominique Even

critiqué par Rotko, le 31 août 2003
(Avrillé - 50 ans)


La note:  étoiles
épopée de l'ascension de Cinggis et de l'expansion mongole.
Chronique du 12e siècle, publiée dans la collection "Connaissance de l'orient"- Unesco.
Au départ, la généalogie des personnages, et la geste mouvementée des nomades sur un territoire immense. L'époque résonne des chevauchées héroïques, des conflits et rivalités entre frères, des amitiés trahies, des alliances rompues. Et pourtant, que de vigueur dans les formulations ! ces alliances devaient assurer bonheur et prospérité... Mais on se tend des pièges, on évalue les faiblesses de l'adversaire, l'opportunité des manoeuvres politiques ou militaires. Les femmes, pommes de discorde entre les différents clans, sont un gibier de choix. Cinggis (Gengis Khan) préside à la distribution des récompenses. Cette chronique présente une intéressante palette de tons. Dans les opérations militaires, l'efficacité prime, et on ne s'attarde pas sur les formalités :
"Au moment de repartir, il (Cinggis) fit ébouillanter les princes des Loups dans soixante-dix chaudrons. Il coupa la tête de Blanc-le-Bel et partit en la traînant à la queue de son cheval".
En revanche, dans les périodes d'attente, des personnages chantent leur inquiétude devant l'avenir, tel le roi Ong. "Je suis vieux maintenant, Je suis un homme âgé : Qui gouvernera tout ce peuple Quand dans ma vieillesse, J'irai sur les hauteurs, Quand dans mon grand âge, J'irai dans la montagne ?" D'autres fois, un dialogue dramatique - entre Tayang et Jamuqa, rival attitré de Cinggis, prend une force dramatique digne de l'attaque de la forêt de Birnam dans "Macbeth".
Principal protagoniste de cette épopée, Cinggis (Gengis Khan) : il sait récompenser les services passés, reconnaître la loyauté de ses adversaires, et donner à chacun la mission qui sera utile à tous. Il rend la justice en homme politique ferme. Il écoute les conseils, mais aussi tranche dans le vif. On rêve d'entendre, en buvant du koumys, le récitant déclamer sous les grandes yourtes la chronique rythmée de l'expansion de la nation mongole. Préfaces, notes, et cartes explicites situent les peuples et les opérations militaires d'envergure, en Europe comme en Asie. On peut considérer cette Chronique comme une Iliade mongole, et de multiples lectures sont possibles.