Le sang des 7 Rois - Livre premier
de Régis Goddyn

critiqué par CC.RIDER, le 20 avril 2014
( - 65 ans)


La note:  étoiles
Un monde étrange
Au pays des sept royaumes, un vieux paysan a été victime d'une étrange agression. Des hommes armés ont enlevé sa petite fille ainsi que le jeune fils de sa bru. Ils se sont enfuis vers les crêtes perdues des montagnes environnantes après avoir laissé une bourse remplie de pièces d'or sur le lit de l'enfant. Alerté, le vicomte Edmond de Hautterre décide de lancer une expédition aux trousses des kidnappeurs. Il place à sa tête le capitaine-ambassadeur Orville, guerrier redoutable car doté du pouvoir d'outre-vision. Le jeune Léo voudrait l'accompagner mais cette mission va se révéler bien plus longue, bien plus compliquée et source de beaucoup plus de conséquences que prévu.
« Le sang des sept rois » n'est que le premier tome d'une saga qui devrait en comporter pas moins de sept ! C'est déjà un gros pavé de 400 pages, dense, touffu qui non seulement sert de présentation des personnages principaux comme Orville, sorte de super-héros quasi invincible ou comme l'énigmatique Rosa, sauvée in extremis du bûcher par un théocrate mais également de mise en place de l'action. Toutes sortes de pistes ou d'ébauches d'intrigues sont esquissées comme la création ab nihilo, sur un archipel aride, d'un huitième royaume qui n'est pas du goût de tout le monde. Le lecteur achève la lecture de ce premier opus dans une sorte de confusion assez déstabilisante. Il a été plongé dans un monde fort complexe, aux règles bizarres, aux us et coutumes étranges (machisme, droit de cuissage, primauté du sang, de la race, eugénisme, rudesse primitive pour ne pas dire sauvagerie ou barbarie) et il a l'impression de n'avoir pas tout compris. Même en lisant et relisant le glossaire situé en fin de volume qui précise fort utilement le rôle de chacune des strates de cette société assez particulière. Sans doute l'auteur en garde-t-il sous le coude pour alimenter les six autres tomes et pour fidéliser son lectorat. L'ennui c'est que, même si tous les ingrédients de la bonne fantaisie sont présents (magie, sorcellerie, clairvoyance, sociétés secrètes, castes, « résurgents », highlanders etc...), même si le style est bon quoique très descriptif, la narration manque énormément de rythme, de suspense et de rebondissements. Il faut parfois se faire violence pour ne pas décrocher. Il est vrai que s'agissant d'une sorte de marathon de lecture (7X400 pages, soit 2800 pages pour une seule histoire, une sorte de record !) il reste quand même à savoir qui se lassera le premier, l'auteur ou le lecteur.
Un premier tome très dense. 6 étoiles

Ici pas d'Elfes, de Nains, de Dragons... à l'instar du Trône de Fer l'auteur nous entraîne dans un univers médiéval-fantasy. On est vite plongé dans une ambiance qui rappelle les bonnes vieilles sagas médiévales littéraires ou télévisées.

En effet le principal attrait du roman c'est son univers, l'auteur nous dépeint une ambiance très médiévale presque historique. Il ancre son récit dans une époque réelle, avec sa société féodale et un clergé omnipotent dont la ressemblance avec certaine Inquisition ne saurait être fortuite. L'auteur nous délivre au fur à mesure du livre un univers qui se complexifie en mettant en scène un contexte politique et des intrigues prenantes.

Par petites touches, l'auteur introduit, dans ce roman que l'on aurait pu croire historique, des éléments de fantasy de façon crédible. Des brigands au comportement pour le moins étrange, des hommes à la longévité exceptionnelle et aux aptitudes peu communes, il n'en faut pas plus pour faire basculer le récit, quasi imperceptiblement.

L'auteur a fait le choix, dès le début du roman, de démarrer son intrigue par un acte a priori banal. Un acte qui très vite se révèle important et devient surtout le déclencheur d’une multitude d’intrigues qui changent l’équilibre des pouvoirs. C'est par une vision morcelée qu'il présente, au lecteur les intentions de chaque personnage ou chaque force en présence. Une manière de procéder qui peut déstabiliser le lecteur au départ, mais l'information nécessaire apparaîtra plus tard dans le récit. Tout, bien entendu, sera loin d'être expliqué dans ce premier volume, et le lecteur devra faire confiance à l'auteur dans cette construction pleine de complexité et de mystère.

La narration du début de roman est décousue, problème dû au nombre conséquent d'éléments à mémoriser. Le lecteur a également un peu de mal à identifier le personnage principal, les premiers chapitres alternant plusieurs personnages. Mais dès que le héros prend en main les destinées du récit, l'intrigue et les personnages évoluent, les secrets se dévoilent, l'action prend de nouvelles voies et la richesse de l'univers des Sept Royaumes s'étoffe avec une certaine originalité.
Le rythme est assez lent, surtout au départ. La mission d’Orville est relativement monotone et prend des semaines. Pourtant, les descriptions apportent une grande richesse et contribuent à bien immerger le lecteur dans ce Premier Royaume. Régis Goddyn prend le temps d’installer son univers, ses personnages et son intrigue, sans tout dévoiler d’un coup, en suivant logiquement le quotidien de certains éléments clés. Aucun d’entre eux n’a une vision vraiment globale et à long terme de ce qui se trame.
Orville est un personnage qui ne renie pas ses origines, politiquement correct, qui reste fidèle à ses convictions et à sa ligne de conduite. Malgré la rédaction de son carnet de bord, on ne sait jamais réellement ce qu'il pense, très renfermé, on admire ses prouesses techniques, mais pas d'épanchement, ni de peine, il reste trop froid et méthodique . Son attitude sur l'île est parfois difficile à comprendre, il prend les choses en mains, et ça c'est très bien, mais peu à peu, ne prend-il pas aussi la grosse tête en voulant créer un nouveau royaume ?

Bien que certaines descriptions au début du roman soient difficiles à suivre, le style de l'écriture est assez soigné, facile à lire, sans être trop simple. On apprécie l'alternance entre récit et journal intime même si l'on n'éprouve aucune empathie pour le personnage principal. Certes, le récit aurait sans doute pu être un peu plus efficace, notamment pour un démarrage qui peut demander quelques efforts avant que le lecteur accroche.
Si l’univers est assez classique en apparence, la qualité de l’écriture, le rythme très personnel et la richesse descriptive donnent un ton unique à ce Livre Premier, malgré un début difficile et un personnage ne générant pas l'empathie du lecteur, on a tout de même envie de lire la suite en espérant moins de monotonie dans les tomes suivants.

Goupilpm - La Baronnie - 67 ans - 29 août 2017