Réponses, pour une anthropologie réflexive
de Pierre Bourdieu

critiqué par Elya, le 22 mars 2014
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Quelques réponses sur la sociologie comme science selon Bourdieu
Dans l’édition écrite de ses cours Sur l’Etat au Collège de France, Bourdieu renvoie à ce livre édité en 1997 ceux qui aimeraient connaître les réponses qu’il donne aux principales critiques dont il est l’objet, en tant que sociologue et non d’homme, bien sûr. Dans cet ouvrage, il réponse à des questions de Loïc J.D. Wacquant, qui rapporte les interrogations d’étudiants américains en sociologie dans les années 80, de la célèbre Ecole de Chicago. C’est une façon intéressante de parcourir l’œuvre de Bourdieu, et les critiques auxquelles il est sujet, la principale accusation à son égard étant souvent celle du déterminisme de sa conception de la société, dont il se défend.

Ce que j’ai particulièrement apprécié dans ce livre, c’est la façon dont Bourdieu parle de la sociologie en tant que science. Il expose son positionnement épistémologique, chose que j’ai peu trouvé dans ses autres ouvrages. Il soutient par exemple que les sciences sociales sont soumises aux règles qui valent pour les autres sciences : « il s’agit de produire des systèmes explicatifs cohérents, des hypothèses ou des propositions organisés en modèles parcimonieux capables de rendre compte d’un vaste nombre de faits observables empiriquement et susceptibles d’être réfutés par des modèles plus puissants » (p159). Il revient aussi sur l’opposition entre l’individualisme méthodologique et l’holisme ou structuralisme qui sous-tend l’histoire de la sociologie et dont on trouve aujourd’hui encore des représentants, en précisant que selon lui la sociologie n’a pas à choisir entre ces deux écoles, ce qui fait la réalité sociale étant l’habitus. Lorsque Loïc Wacquant évoque l’existence d’une « théorie bourdieusienne » d'applicabilité très générale, Bourdieu s’en défend en disant que « ces outils son visibles seulement dans les résultats qu’ils produisent et ils ne sont pas construits comme tel » (p135).

La deuxième partie du livre est issue de l’introduction à un séminaire de l’Ecole des hautes études en sciences sociales réalisé par Bourdieu. Il est intéressant d’y lire un Bourdieu plus pédagogue, qui expose quelques-unes de ses astuces de chercheur en sociologie, comme l’utilisation d’un « tableau carré des traits pertinents d’un ensemble d’agents et d’institution » (p201).

Ceux qui sont déjà familiarisés à quelques travaux de Bourdieu pourront peut-être trouver, dans cet ouvrage, des réponses aux questions que suscitent leurs lectures.