Pseudosciences et postmodernisme : adversaires ou compagnons de route ?
de Alan D. Sokal

critiqué par Elya, le 21 mars 2014
(Savoie - 34 ans)


La note:  étoiles
Toucher thérapeutique, nationalisme hindou
Alan Sokal est un physicien étatsunien, co-auteur avec Jean Bricmont, physicien français, d’Impostures intellectuelles paru en 1997. Dans cet ouvrage traduit et édité en français en 2005, il reste dans un thème similaire, notamment en critiquant le courant du postmodernisme lorsqu’il s’en prend aux sciences. Voici les caractéristiques de ce dernier selon Sokal et Bricmont :
« - le rejet plus ou moins explicite de la tradition rationaliste des Lumières ;
- des élaborations théoriques indépendantes de tout test empirique ;
- un relativisme cognitif et culturel qui traite les sciences comme des « narrations » ou des constructions sociales parmi d’autres
».
Il s’agit plus précisément d’établir un lien entre les manifestations du postmodernisme et celles de ceux qui revendiquent et pratiquent des pseudosciences. Sokal se base sur le cas du toucher thérapeutique, pratique exercée par des infirmiers surtout aux Etats-Unis qu’il considère comme une pseudoscience. Il expose des extraits d’ouvrages écrits par ceux qui l’enseignent et croient en son efficacité, qui n’a jamais été mise en évidence expérimentalement jusqu’à ce jour. Dans une seconde partie, il traite d’une tendance postmoderniste qui sévit en Inde depuis les années 80 chez les intellectuels de gauche, « qui favorisent sans le vouloir l’accession au pouvoir de la droite nationaliste hindoue, une formation dont la doctrine, politique et religieuse, accorde une place centrale à une pseudoscience qui se fait passer pour une science authentique [l’hindouisme] ».
Deux appendices enrichissent le propos général de l’ouvrage. Le premier est une sorte de manifeste qui remet en cause le traitement de faveur que connaissent les religions, qui ne sont rarement qualifiées de pseudosciences, alors qu’elles le sont selon Sokal. Le second, écrit avec Jean Bricmont, traite d’épistémologie.

L’intérêt de cet ouvrage ne réside pas tellement selon moi dans le parallèle qui est établi entre les pseudosciences et le postmodernisme (je souligne au passage le faux dilemme du sous-titre « adversaires ou compagnons de route » qui ne reflète pas du tout le contenu), mais plutôt dans considérations épistémologiques qui se succèdent. Sokal n’oublie pas de préciser en quoi ces critiques sont importantes. Le climat intellectuel qu’instaurent les différentes formes de relativisme est en effet, à ses yeux, peu propice à l’analyse rigoureuse des faits.