Liberté, égalité, Olympe de Gouges
de Catherine Le Quellenec

critiqué par JulesRomans, le 27 mars 2014
(Nantes - 65 ans)


La note:  étoiles
Olympe de Gouges se bouge dans les salons et pas dans les bouges
"Liberté, égalité, Olympe de Gouges" est une biographie romancée comme Catherine Le Quellerec sait pertinemment le faire, avec des femmes au destin exceptionnel, pour les jeunes. Elle a déjà évoqué dans cette collection en particulier Nancy Wake, agent anglais durant la Seconde Guerre mondiale, dans le titre "La souris blanche" (présentation sur Critiques libres).

L’auteure choisit comme narrateur Olympe de Gouges ; cette option permet de mieux rentrer dans le portrait psychologique que l’auteure veut s’en faire. Pour un personnage complexe comme celui-ci, enfant adultérin aux yeux de tous et veuve précoce d’un mari imposé, c’est habile. En effet l’auteure peut ainsi faire exprimer des opinions hétérodoxes qu’elle prête (certainement à juste raison) à narrateur Olympe de Gouges de façon plus crédible que si un narrateur externe les énonçait. Ainsi page 16 :

« La seule véritable belle chose qui me soit arrivée durant ces années maudites fut la naissance de mon fils Pierre. Et puis, un bonheur n’arrivant jamais seul, mon mari mourut… J’étais veuve à dix-huit ans et … heureuse ».

On notera que huit des dix chapitres se centrent sur un personnage précis indiqué dans le titre de cette partie : le père de l’héroïne, la mère de cette dernière, l’amant d’Olympes, un ami Louis-Sébastien Mercier, le girondin Jacques-Pierre Brissot et le problème de l’esclavage que l’héroïne a combattu (voir en complément chez le même éditeur et dans la même collection "Toussaint Louverture : l’arbre noir de la liberté"), Fanny de Beauharnais (une mention que cette dernière avait épousé le frère du mari de Joséphine de Beauharnais aurait été utile), Marat, le fils d’Olympe.

Sur ce dernier, faute d’actions positives à lui attribuer, il n’est rien dit de précis ; rappelons que, juste après la mort d’Olympe, il fit afficher une affiche à Tours (où il était officier) et adresser une profession de foi où il s’estimait "trop heureux de pouvoir faire le sacrifice de sa mère à sa patrie". Ceci est rapporté dans l’ouvrage d’Olivier Blanc chez Tallandier (présenté sur Critiques libres), ainsi que le fait qu’il accepte à l’été 1801 un commandement en Guyane pour y mâter d’éventuelles révoltes de noirs du fait du rétablissement de l’esclavage que vient de décider le Premier consul Napoléon Bonaparte.

Dans les pages documentaires de "Liberté, égalité, Olympe de Gouges" on aurait pu trouver cela pour rappeler que l’esclavage combattu par Olympe ne fut définitivement aboli dans les possessions françaises qu’en 1848. Ce manque n’enlève pas pour autant beaucoup d’intérêt au dossier documentaire. Dans cette collection, ils sont généralement excellents. Des points de repères utiles sur le déroulement de la Révolution sont en particulier proposés, la déclaration des droits de la femme et de la citoyenne est entièrement reproduite et par ailleurs des phrases phares des autres écrits d’Olympe sont proposées.

"Liberté, égalité, Olympe de Gouges" devrait trouver sa place dans tous les CDI des collèges et lycées de France et de Belgique (à la mort d’Olympes, les Pays-Bas autrichiens sont français et vont le rester pour vingt ans). Nul doute que la quelque peu provocatrice et géniale couverture incitera les adolescents à connaître le contenu de ce livre.